KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Maxime Chattam : le Requiem des abysses

roman fantastique, 2011

chronique par Philippe Paygnard, 2014

par ailleurs :

Après les tragiques événements qu'ils ont vécus, Guy de Timée et Faustine ont trouvé refuge dans l'anonymat de la campagne française. Hébergé par son ami, Maximilien Hencks, dans sa propriété du Vexin, Guy n'a toujours pas recouvré l'envie d'écrire. Une disparition, puis un crime tout aussi horrible que ceux dont il a été témoin à Paris, remettent Guy sur la route d'un impitoyable assassin, vivante incarnation du Mal.

C'est sans déplaisir aucun que l'on retrouve Guy de Timée, romancier plein de doutes. Comme ce Requiem des abysses est la suite directe de Léviatemps, cela permet à Maxime Chattam d'entrer directement dans le vif du sujet, même si le sujet est ici le plus terrifiant des massacres, celui de toute une famille. Nul besoin de longues descriptions pour faire découvrir à ses lecteurs le petit village isolé de tout qu'est Saint-Cyr, à l'aube du xxe siècle, loin de la fée Électricité et de son cortège de progrès.

Fasciné par le Mal et malgré l'opposition des gendarmes en charge de l'affaire, Guy de Timée se transforme en véritable détective pour enquêter sur l'assassinat des Lornan. Dans cette première partie du roman, il rivalise avec Auguste Dupin et Sherlock Holmes dans l'art de la déduction. En résolvant un rébus laissé par l'une des victimes, il donne un nom à son adversaire : le Croquemitaine. Ainsi baptisé, le criminel qui terrorise le Vexin pourrait être le devancier des Leatherface, Ghostface et autre Jigsaw qui hantent les slashers au cinéma.

En ramenant ses héros à Paris, pour conclure tout à la fois ce roman et le diptyque qu'il constitue avec Léviatemps, Maxime Chattam rajoute à ce qui pourrait n'être qu'un rétro polar une bonne dose de magie noire et de sciences occultes. Cette addition de dernière minute donne finalement une légère couleur fantastique à ce livre, avec, notamment, le retour d'outre-tombe du diabolique Hubris. D'autant que Maxime Chattam n'élucide que très partiellement le mystère des momies qui inaugure cet ouvrage et ne livre pas tous les secrets de la folie meurtrière d'Hubris, même si son identité est enfin dévoilée avant la fin du récit.

Par ailleurs, Maxime Chattam semble poursuivre son jeu de références shakespeariennes. Ainsi, après le Caliban, emprunté à la Tempête d'In tenebris (2003), il baptise le château de Maximilien Hencks du nom d'Elseneur et lui donne un certain Yorick comme gardien, renvoyant forcément à Hamlet. Continuant dans la série des clins d'œil, il permet à son héros de surnommer son mystérieux adversaire Moriarty, Némésis bien connue de Sherlock Holmes de sir Arthur Conan Doyle. Quant au docteur Faulsôme du village de Saint-Cyr, il fait irrésistiblement songer au légiste de l'Âme du Mal qui s'appelle Folstom.

L'épitaphe d'une demi-douzaine de pages qui vient conclure le livre semble indiquer que la carrière romanesque de Guy de Timée est définitivement terminée.

Même si l'action emporte immédiatement le lecteur de ce Requiem des abysses, la rupture de rythme avec le retour sur Paris et la résurgence de l'intrigue de Léviatemps font perdre une bonne part de son intensité à ce roman qui reste divertissant s'il n'est pas inoubliable.

Philippe Paygnard → Keep Watching the Skies!, nº 73, février 2014

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