KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Jean-François Kierzkowski : le Bibliomane

roman fantastique, 2010

chronique par Jérôme Charlet, 2012

par ailleurs :

C'est presque par hasard que j'ai découvert cet auteur. Discutant avec l'éditeur (qui est un ami), il m'a mis un jour entre les mains le premier roman de Jean-François Kierzkowski, Grande faim, en me disant qu'il fallait absolument que je le lise… Et depuis, je ne rate aucun de ses romans.

Le Bibliomane est le troisième roman adulte de cet auteur (et, pour moi, le plus fascinant et le plus intéressant qu'il ait écrit). Utilisant la technique du personnage-point-de-vue stricte, le Bibliomane, c'est le parcours d'un homme. Travaillant dans une imprimerie, il perd son pouce en massicotant un livre. Il va trouver un nouvel emploi chez… un bibliophile, mais un bibliophile assez particulier. Ce collectionneur compulsif (fou ?) lui demande de découvrir, au sein de sa maison-bibliothèque, qu'un domestique passe son temps à arroser d'insecticide, un livre. Un seul et unique livre. Et surtout, surtout, de le détruire.

Mais ce livre n'est-il, justement, qu'un simple livre ? Et ce travail est-il si inoffensif que cela ?

Ce roman est une véritable plongée dans la folie. Folie bien sûr de ce collectionneur, qui, comme tout accumulateur compulsif, possède une part de dérangement mental (dérangement qui se ressent également dans les absolument incroyables règles qui régissent le rangement de sa bibliothèque). Folie du domestique, qui, en guise de préalable à l'entretien d'embauche du personnage, lui demande s'il veut prendre un bain (et ce n'est pas là la moindre des bizarreries qu'il montrera). Folie surtout du personnage principal, qui fait glisser peu à peu le lecteur dans sa propre folie, par ricochet, à travers la manière même dont le roman est écrit.

Mais le Bibliomane ne s'épuise pas avec ce simple angle de lecture. Il nous interroge aussi sur des sujets aussi divers que la culture et son accueil, sur l'évolutionnisme, sur ce que cela signifie réellement que de publier, que d'écrire, que de donner à lire, et bien plus, que de recevoir un texte. Sur les relations humaines et amoureuses, également…

Bref, voilà un très bon roman, vraiment excellemment écrit (et que l'on découvre aussi extrêmement documenté), que je recommande plus que très chaudement.

Mais attention : une fois que vous aurez goûté à la prose de Jean-François Kierzkowski, vous ne pourrez vous empêcher de guetter le suivant : cette bibliomanie est un virus bien pervers…

Jérôme Charlet → Keep Watching the Skies!, nº 71, octobre 2012

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