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Gérard Klein : préfaces et postfaces

Frank Herbert : la Ruche d'Hellstrom

Livre de poche nº 7264, juin 2004

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Si la Ruche d'Hellstrom n'est pas le plus éblouissant des romans de Frank Herbert, il n'en laisse pas moins une impression forte, en quelque sorte inoubliable, à la plupart de ses lecteurs.[Couverture du volume] Outre son originalité, il résume par ailleurs les thèmes principaux de la métaphysique de Frank Herbert si l'on peut employer ce terme.

Lorsqu'il publie, en deux parties en novembre et décembre 1972 dans la revue Galaxy, "Projet 40", la première version de la Ruche d'Hellstrom, Frank Herbert donne l'impression de traverser une sorte de passage à vide, au moins littérairement. Il a publié en 1969 la version magazine du Messie de Dune, puis en 1970 un bref mais indiscutable chef-d'œuvre sur le thème de la communication entre espèces intelligentes que tout sépare, l'Étoile et le fouet, puis seulement quelques nouvelles. Après 1972, il faudra attendre 1976 pour voir réapparaître une œuvre marquante, les Enfants de Dune. Entre-temps, il donne un peu l'impression de bricoler. À moins qu'il ne se consacre à la psychanalyse ou au jardinage écologique visant à l'autarcie dans sa ferme de l'État de Washington.

Mais en 1971, quelque chose a éveillé son attention et réveillé sa verve. Cette année-là, un entomologiste, Nils Hellstrom, au terme d'une recherche de neuf ans, a sorti un film documentaire de 90 minutes, the Hellstrom chronicle, produit par David L. Wolper, sur la vie des insectes, et en particulier des termites, démontrant leur extraordinaire capacité de survie qui excède de très loin celle que l'on peut prêter à l'espèce humaine. Pour Hellstrom, dans l'inévitable conflit pour les ressources entre l'humanité et les insectes, les humains jouent perdant.

Mais la donnée la plus remarquable est que le supposé héros de ce documentaire n'existe pas. Le Professeur Nils Hellstrom est incarné par un acteur, Lawrence Pressman. On présume que les insectes sont interprétés par eux-mêmes. Le succès est immédiat et considérable. Le film est décliné sous toutes les formes possibles à commencer par celle d'un livre de photos [2]. Son réalisateur, Walon Green obtient un Oscar pour le meilleur documentaire et le Grand Prix de la Technique au Festival de Cannes la même année. Il sera diffusé à la télévision en 1974 par la chaîne ABC.

Frank Herbert l'a vu dès sa sortie, peut-être dès avant, et il est immédiatement enthousiasmé. Si bien qu'il demande au producteur l'autorisation de reprendre le nom du personnage fictif de Hellstrom et quelques traits de sa biographie supposée. On ne saurait rien refuser à l'auteur de Dune, et il l'obtient. Ainsi par un curieux concours de circonstances et de passions, un film inspire un roman alors que la transposition s'effectue en général dans l'autre sens.

De toute évidence, ou du moins à travers les critiques que j'ai pu en lire car je ne l'ai pas vu et je ne sais même pas s'il est sorti en France, le film a considérablement dramatisé la vie des insectes et l'état de concurrence ou plutôt de guerre dans lequel ils se trouveraient avec les nouveaux maîtres apparents de la planète, les humains. Ce lointain précurseur de notre Microcosmos privilégiait sans doute le spectaculaire au détriment de l'exacte vérité scientifique. Mais c'était la source d'inspiration dont Herbert avait besoin.

Curieusement, dans la neuvième nouvelle de Demain les chiens, "Épilogue" [3], écrite longtemps après les autres et publiée en 1973, donc après la sortie du film, Clifford Simak écrit ceci qui exprime les réflexions du robot Jenkins :

« Les Fourmis avaient vécu en circuit fermé. Leur monde avait été un monde clos. Avaient-elles échoué parce qu'elles n'avaient pas d'endroit où aller ? Ou bien était-ce parce qu'elles avaient vécu depuis le départ dans un monde clos ?

Il y avait eu des Fourmis dès le Jurassique, cent quatre-vingts millions d'années auparavant, sinon plus. Des millions d'années avant que ceux qui avaient précédé l'homme ne fissent leur apparition, les Fourmi avaient établi un ordre social. Leur degré de civilisation n'avait pas été très loin : une fois leur ordre social établi, elles s'en étaient contentées. Mais comment savoir si elles en étaient satisfaites parce que c'était tout ce qu'elles voulaient faire, ou bien parce qu'elles étaient incapables de dépasser ce stade ? Elles étaient parvenues à la sécurité et, pendant toute l'Ère Jurassique, et pendant encore plusieurs millions d'années, ce résultat leur avait amplement suffi. »

Jenkins s'interroge sur l'échec final des Fourmis [4]. Il est bien conscient d'anthropomorphiser leur cas et s'en effraie car l'échec des Fourmis pourrait signifier celui des humains auxquels il voue un culte bien qu'ils aient disparu de la Terre depuis au moins un millier d'années. Et plus loin, il ajoute, ratiocinant un peu :

« Les Fourmis avaient construit leur société pendant le Jurassique ou même avant, et avaient vécu à l'intérieur de cette structure pendant des millions d'années, et voilà pourquoi, peut-être, elles avaient échoué. La société fondée sur la sécurité de la fourmilière était si solidement imprimée en elles qu'il n'y avait pas moyen d'y échapper. »

Donc, la réponse de Simak à Hellstrom, à supposer qu'il ait vu le film, c'est que, bon d'accord, les fourmis ont tenu un bout de temps mais la perfection même de leur organisation sociale les voue à l'échec et à la disparition. Les humains ont conservé leur chance.

La réaction de Frank Herbert est toute différente. On le sait depuis Dune hanté, et peut-être même obsédé, par la perspective de la disparition possible de l'espèce humaine, de la nécessité de l'organisation à tout prix de sa survie à long terme dans un univers de compétition impitoyable, et par une écologie en quelque sorte brutale, tendant à la discrétion extrême dans les rapports avec l'environnement, voire à l'autarcie, et servant ce projet de durer [5]. Recyclant l'eau de leurs excrétions et jusqu'à celle de leurs morts et de leurs victimes, les Fremen de Dune vivent pratiquement en autarcie hydrique.

Mais jamais, sur ce registre, il n'est allé aussi loin que dans le présent roman, et jamais il n'ira plus loin. Puisque les insectes sociaux ont survécu sans grands changements durant près de deux cents millions d'années, traversant apparemment sans broncher quelques disparitions massives d'espèce, ils montrent la voie. L'avenir de l'humain, c'est la termitière. Peut-être pas de l'humain au sens où nous l'entendons ordinairement, mais certainement du transmetteur des gènes qui ont produit l'humanité. Encore ce capital génétique est-il voué à changer. Ce qui se transmet et perdure c'est une volonté de survie assez proche de la volonté de puissance nietzschéenne.

L'écologisme de Herbert — en tant que doctrine - qui s'inscrit dans la métaphysique d'une écologie se voulant scientifique, est totalement abhumaniste. Il entend refléter un état de nécessité. Et au vu de l'état actuel de la planète, on ne saurait lui donner entièrement tort, même si l'on trouve que, dans ses fictions, il pousse le bouchon un peu loin. Herbert relève ici la contradiction ultime des capitalismes — libéraux, oligopolistiques ou étatiques, c'est presque pareil de ce point de vue — que Marx n'avait pas envisagée (et il ne le pouvait guère en son temps) : leur entreprise de domination sans frein de la nature exploite, paupérise, en quelque sorte prolétarise, leur environnement plutôt qu'une classe sociale, jusqu'à ce que sa destruction entraîne leur chute et avec eux celle de l'humanité.

Herbert s'inspire là du radicalisme des eco-warriors, ces “écologistes guerriers” de l'extrême, à peu près exclusivement anglo-saxons avec quelques métastases en Europe du Nord et au Japon, que leur intégrisme pousse à la violence pour défendre ce qu'ils considèrent comme un milieu naturel sacralisé. Ou bien il contribue peut-être à l'inspirer : il faudrait pour trancher une étude historique serrée.

Notons en passant au risque d'anticiper un peu sur notre développement que la Ruche d'Hellstrom est le modèle abouti de l'hypothétique “système de production asiatique” de Marx dans lequel tous sans exception se trouvent placés au service de l'État au nom du bien collectif. Notons également que le terme de ruche en français ne rend pas tout à fait l'anglais hive qui est un peu plus vague ou plus général et qui renvoie aussi bien à l'essaim qu'à la ruche d'abeilles ; il peut même caractériser dans le terme hive-nest un nid collectif d'oiseaux par exemple, et sous forme de verbe signifier mettre des réserves de côté comme font les abeilles.

Les insectes sociaux offrent un autre exemple. C'est qu'ils n'ont pas toujours été sociaux, qu'ils n'ont pas depuis l'origine constitué des êtres collectifs comme l'essaim, la fourmilière, la termitière. Ils ont existé à l'état individuel et de nos jours encore il subsiste marginalement des espèces d'abeilles sauvages dont la socialisation est rudimentaire. C'est un effet de l'évolution et de la pression de sélection que d'avoir constitué à partir d'espèces individuées et dont la reproduction demeurait affaire individuelle, à travers des processus émergents, des ensembles sociaux minutieusement structurés et où la transmission des gênes n'est plus l'affaire que de quelques constituants du corps collectif. Puisque ces insectes — mais pas tous — ont réussi cette transformation, pourquoi l'humanité — ou d'une moins une fraction d'elle, en serait-elle incapable, obéissant à la fois à la pression déterministe du milieu et à son intelligence de cette pression qui lui permet de la devancer ?

Ce qui, soit dit en passant et au risque de faire passer Frank Herbert pour ce qu'il n'est certainement pas, un marxiste secret ou encore inconscient, reproduit assez exactement la problématique de Karl Marx face au mouvement de l'Histoire tel qu'il le théorise, à la fois déterministe, prévisible et précipitable, sauf qu'il s'agit ici de lutte pour la survie entre espèces, ou à l'intérieur de l'espèce humaine entre groupes qui s'affrontent sans se subordonner, et non de lutte des classes. En fait la rencontre n'est ni accidentelle ni arbitraire : elle signe dans les deux cas une approche dite matérialiste, prétendument fondée pour la première sur des lois de l'histoire et pour la seconde sur des lois de la nature, au demeurant aussi métaphysiques les unes que les autres. La différence notable, faut-il le souligner, est que Herbert est un auteur de fictions alors que Marx, lui, ne plaisantait pas.

Même si c'est possible, transformer un groupe de l'humanité en mammifères insectoïdes sociaux, ou plus exactement en mammifères eusociaux, est une œuvre de longue haleine. On sait que Frank Herbert met presque toujours en scène derrière des personnes (ici au sens antique de masques de théâtre) des acteurs collectifs. Même si ce sont des personnages puissants et fortement identifiés, Jessica et Paul dans Dune par exemple renvoient à plusieurs acteurs collectifs, le Bene Gesserit, les Grandes Familles, les Fremen, les participants du Jihad.

Ici, Hellstrom est à la fois la tête pensante et la représentation de l'acteur collectif qu'est la Ruche non seulement dans son extension physique à travers ses dizaines de milliers de constituants mais aussi dans son extension temporelle au fil de l'histoire de son développement. Hellstrom sait qu'il ne constitue qu'un maillon d'une chaîne, mais parce qu'il le sait, il représente toute la chaîne qui s'étire sur des siècles. En face de lui, Janvert, le représentant de l'Agence sur laquelle je reviendrai, renvoie lui aussi à un acteur collectif, immédiatement à son organisation, et bien au-delà à tout l'ensemble des Hommes sauvages (dont nous sommes) encore ignorants du compétiteur et du danger que représente la Ruche pour leur variété humaine qui a cessé d'être unique.

Combien de siècles exactement a-t-il fallu pour constituer cette chaîne, aboutir au point déjà avancé où l'humanité de la Ruche s'est substantiellement différenciée de l'humanité sauvage ? Et quel acteur collectif peut maintenir constant un tel projet sur une aussi longue période ? Sur la première question, Herbert est à son habitude assez peu clair contrairement à nombre de ses collègues qui adorent dater leurs histoires du futur et jusqu'aux racines de ces dernières dans l'Histoire. Herbert est sans doute conscient de la difficulté majeure de tout prospectiviste, voire de l'historien, qui n'est pas tant de repérer des tendances lourdes et des ruptures possibles, ou même constatées, que de les situer précisément dans le temps. Tout le monde sait quand la Bastille a été prise mais il est beaucoup plus difficile de dire à partir de quand un tel événement, en lui-même anecdotique, était devenu pensable. Nul ne doute qu'il n'y aura un jour plus une goutte exploitable de pétrole mais nul ne sait quand exactement. De surcroît, le vague des indications fournies oblige le lecteur à spéculer à partir de ses propres connaissances historiques et donne au texte, comme dans Dune, l'illusion efficace d'une profondeur de champ.

Le texte nous fournit un certain nombre d'indications aussi complémentaires que parfois presque contradictoires. Les plus claires viennent de fragments des textes attribués à Trova Hellstrom qui semble avoir vécu au XIXe siècle. C'est elle qui paraît avoir dirigé l'installation de la future Ruche dans une ferme du Val Gardé de l'Orégon, puis présidé à sa première installation souterraine, en avril 1876, dans des grottes naturelles sous la ferme, et qui semble pressentir sa propre mort en 1896. Mais cet établissement a succédé à des migrations séculaires, à une série de fuites destinées à permettre au groupe des “doux” (allusion directe à l'Évangile qui promet aux “simples en esprit” qu'ils hériteront de la Terre) d'échapper à la violence du monde des autres humains. Et la Fondatrice de préciser :

« Le moment est venu de ne plus fuir, mes ouvriers bien-aimés. Nous qui avons vécu clandestinement une double vie chez les hommes de l'Extérieur pendant plus de trois cents ans, en nous cachant, en étant toujours prêts à décamper au plus léger soupçon, nous sommes arrivés au lieu qui nous servira de refuge et qui nous rendra forts. »

Plus de trois cents ans avant quelle date ? Certainement avant 1876 au moins, mais plus vraisemblablement avant la première installation du groupe dans la ferme, disons vers 1870, on verra plus loin pourquoi. Ce qui nous renvoie à un point de départ situé vers 1550 ou un peu auparavant, c'est-à-dire aux alentours de la Réforme, luthérienne ou calviniste. Mais la philosophie de la Ruche, ou du moins les fragments que nous en laisse entrevoir l'auteur, semblent remonter plus haut, aux Millénarismes qui n'ont pas cessé de se succéder du treizième au seizième siècle au moins, constamment persécutés, et qui ont du reste contribué à faire le lit de la Réforme. Le groupe qui va devenir la Ruche s'est-il séparé des Anabaptistes de Münster (1534/1535) ? Ou bien remonte-il plus haut encore aux Hommes de l'Intelligence, société secrète constituée à Bruxelles au début du quatorzième siècle et dont les survivants, après la répression de 1411, iront s'installer en Bohême ? Sont-ils les descendants des hussites ou des taborites qui, s'alliant aux précédents, formeront la secte des adamites, cherchant à fonder une société édénique, qui sera impitoyablement réprimée par le chef taborite Jan Ziska ?

Au sens strict, la Ruche ne semble pas millénariste. Elle n'attend pas le retour d'un Messie, et sa métaphysique est strictement moniste, matérialiste. Mais elle promet bien à ses membres qu'ils créeront leur paradis sur terre et qu'ils hériteront de la Terre, ce qui est l'essence de beaucoup de mouvements millénaristes.

Mais alors une autre question se pose. Que l'on fasse remonter la fondation du groupe au seizième ou au quinzième siècle, son idéologie évolutionniste apparaît anachronique. Certes, bien plus tard, Trova Hellstrom a affirmé avoir été inspirée par des visions du “bienheureux Mendel”. Mais outre que celui-ci (1822 -1884) n'a exposé ses travaux qu'en 1865, donc bien après la fondation du groupe, il a fallu que Trova dispose d'une surprenante curiosité scientifique pour les étudier car ils n'ont été en fait reconnus et largement diffusés qu'à partir de 1900. Il est vrai que Mendel les a rendus publics à Brno, en Moravie, c'est-à-dire en Bohème.

À partir de là on peut tenter de reconstituer un itinéraire philosophique et géographique du groupe, hautement spéculatif et dont il m'est impossible de dire ce qui en revient à Herbert et à mes propres supputations.

Au début du quinzième siècle, un groupe religieux dissident et non-violent, peut-être issu des Hommes de l'Intelligence, trouve refuge en Bohème. (Si j'insiste sur cette origine possible, c'est que la Ruche ne manifeste aucun tabou sexuel ce qui n'est généralement pas le cas des sectes et courants issus de la Réforme mais se rencontre fréquemment chez les Millénaristes, en particulier chez les Hommes de l'Intelligence qui privilégient les principes d'égalité et de liberté amoureuse. Les membres de la Ruche sont frugaux du point de vue de l'alimentation et des conditions de vie mais ils considèrent comme entièrement admissibles les plaisirs de la chair et semblent même les avoir développés au plus haut point chez leurs reproductrices.) Ce groupe adhère possiblement au mouvement adamite mais se tient autant qu'il le peut à l'écart du reste des hommes, adoptant donc par nécessité un mode de vie agricole. Les violences des seizième et dix-septième siècles, en particulier la Guerre de Trente Ans, ne peuvent qu'avoir incité les membres du groupe qui n'est pas encore la Ruche, à demeurer cachés.

Au contact de la nature et observant les résultats de la sélection artificielle qu'ils pratiquent empiriquement pour améliorer leurs cultures et leurs élevages, ils commencent à se différencier physiquement selon la spécificité de leurs apports au groupe, tout en respectant formellement leur principe d'égalité.

Par hasard ou par soif de connaissances utiles, l'une des hautes responsables du groupe, Trova Hellstrom écoute à Brno en 1865 les conférences du Moine Mendel, ou lit ses travaux l'année suivante lors de leur publication. Ces découvertes expliquent en partie et fondent scientifiquement les procédures empiriquement appliquées et les résultats obtenus par les cultivateurs et les éleveurs depuis des millénaires. Trova Hellstrom y puise donc sur un mode quasi-religieux, celui d'une révélation (les visions), les bases scientifiques et théoriques qui vont désormais orienter l'évolution du groupe. Quelques années plus tard, comme des dizaines de sectes ou de groupuscules utopiques européens, le groupe émigre vers une Amérique réputée vide et accueillante et atteint la vallée qui va lui servir d'ultime refuge dans l'Orégon à un moment où cette région est à peine colonisée : cet État n'est admis dans l'Union qu'en 1859. Le groupe a par ailleurs fait du chemin dans son idéologie : il a substitué à une religion de Dieu, une religion de l'Homme, ce qui est caractéristique de la pensée du dix-neuvième siècle (Marx, Comte, Nietzsche, entre cent autres). L'objet de la transcendance s'est déplacé d'un Être suprême à l'Homme en devenir, voire à l'avenir de l'Homme.

Au vingtième siècle, la Ruche enfin constituée a su s'entourer de tout l'équipement scientifique intellectuel et matériel indispensable à la poursuite de son développement, et son obstination quasi obsessionnelle lui a même fait prendre de l'avance dans certains domaines sur le reste de l'humanité au moment de sa découverte par l'Agence. Ce moment se situe, d'après le contexte du roman, dans un avenir proche par rapport à la date de son écriture, c'est-à-dire vers la fin du vingtième siècle voire même avant, puisque l'un des assistants de l'Agence est tout récemment revenu de la guerre du Việt Nam.

Cette reconstitution a l'avantage supplémentaire de répondre à la deuxième question et de nous fournir le seul agent collectif capable de maintenir un tel projet sur une aussi longue durée. Certes, les membres de La Ruche et en particulier ses dirigeants bénéficient d'une longévité bien supérieure à celle des humains sauvages. Mais cela ne suffit pas. Pour soutenir une telle constance sur le long terme, il faut un groupe à l'origine d'inspiration religieuse. Et c'est de surcroît, un type d'agent collectif que Frank Herbert affectionne particulièrement. Ainsi, le Bene Gesserit, dans Dune, non seulement est organisé sur le mode d'un ordre religieux exigeant de ses membres, tous féminins, une obéissance fanatique (on songe au perinde ac cadaver des Jésuites), mais encore implante des croyances religieuses artificielles afin de protéger ses membres sur le long terme, à travers la Missionaria Protectiva. Herbert pense, non sans apparence de raison, que les croyances durent plus que les lois, et les églises plus que les empires.

Un rapprochement ironique s'impose ici. Alors que Frank Herbert (1920-1986) introduit dans ses fictions des religions artificielles et s'emploie largement à en dénoncer l'imposture, son presque contemporain Lafayette Ron Hubbard (1911-1986), écrivain aussi abondant que médiocre, bricole vers 1950 une psychothérapie de bazar, la Dianétique, fonde une organisation pour la vendre, invente une doctrine quasi-religieuse avec mythe des origines et eschatologie, le tout emprunté à la science-fiction bas de gamme des pulps magazines, la Scientologie, et transforme finalement cette dernière en Église à des fins d'évasion fiscale [6]. L'un imagine des religions, l'autre en crée une de toutes pièces pour satisfaire son appétit de pouvoir.

Le groupe qui va devenir la Ruche est donc une secte, au sens étymologique, un rameau qui s'est séparé du tronc principal de l'humanité. Je l'appellerai donc dans la suite de ce texte la Secte bien que sauf erreur de ma part le terme ne figure pas dans le roman de Herbert.

Comme le Bene Gesserit, la Secte poursuit un but métaphysique et s'engage dans un projet à l'origine fantasmatique mais dont la rationalité se précise et même se dévoile à mesure du progrès de sa réalisation. Cela résonne un peu comme le concept hégélien de l'État idéal et universel, posé à un moment où sa réalisation est inimaginable dans une Allemagne divisée en petits états réactionnaires et pensé peut-être précisément en réaction à cette situation. Il y a du reste quelque chose d'hégélien dans la perfection dynamique de l'organisation de la Ruche mais le substrat de cette organisation est ici biologique au lieu d'être institutionnel.

Une autre question se pose. Pourquoi la Secte a-t-elle intégré les enseignements de Mendel alors qu'elle ne semble pas faire grand cas de Darwin ? C'est que le premier est un praticien, un expérimentateur et un technicien tandis que le second est surtout un théoricien de l'évolution. La Ruche a besoin de connaissances pratiques pour survivre, elle se soucie peu d'explications finales et de théories. J'ai souligné ailleurs que Frank Herbert s'intéresse davantage aux techniques qu'aux sciences et aux grandes théories globalisantes dont il se méfie [7].

Cependant, même si l'on admet une parfaite maîtrise de la technique, un siècle ou un siècle et demi entre la révélation mendélienne et la découverte de la Secte par l'Agence, c'est bien court. Il a fallu quatre ou cinq siècles aux éleveurs anglais pour obtenir par sélection en matière de races de chiens les monstruosités pathologiques qui ont fait leur réputation. D'autant que la vie humaine est plus longue que la canine et que le régime protecteur de la Ruche semble l'allonger encore, certes bien après la période de reproduction. D'autant aussi que Trova Hellstrom semble avoir exclu toute “chirurgie génétique” avant même que l'ingénierie génétique ait pris tout son sens. C'est ici que la chronologie suggérée par Herbert et que je me suis efforcé de préciser pêche le plus. Cela représente quinze à vingt générations, trente tout au plus en remontant plus haut.

Car la découverte du Val Gardé puis de la Ruche par l'Agence semble assez précisément datée, sensiblement à l'époque de la rédaction du roman, au cours des années 1970. Mais qu'est-ce que cette Agence ? Un service d'espionnage ultra-secret dont on sait qu'il ne relève ni de la C.I.A. ni du F.B.I. bien qu'il entretienne avec eux des relations, qu'il dispose à la fois de sections renseignement et de sections action, qu'il peut établir un contact direct avec le Président si nécessaire, et surtout que sa curiosité est sans limite, qu'elle enfreint délibérément les limites constitutionnelles protégeant la vie privée : c'est en espionnant — il n'y a pas d'autre mot — la bibliothèque de l'Institut de Technologie du Massachusetts qu'un de ses agents est tombé sur des esquisses du Projet 40 qu'un collaborateur d'Hellstrom avait laissé traîner. Rappelons ici que le Projet 40 ne concerne pas la Ruche en elle-même mais le dard — l'arme ultime de dissuasion — dont elle essaie de se doter pour se protéger des humains sauvages [8].

L'Agence est donc une métaphore transparente du totalitarisme bureaucratique qui tend à pervertir les démocraties les mieux établies. Janvert, l'un de ses responsables, en est tout à fait conscient mais il est tout à fait incapable malgré la fausse conscience qu'il en a (dirait Marx) d'entraver ce processus et, pire encore, il en vient à le servir parce qu'il l'estime nécessaire.

L'affrontement entre la Ruche et l'Agence représente donc ici celui entre deux tendances à la collectivisation de l'espèce humaine, la première biologique, délibérée et contrôlée, la seconde politique, résultant apparemment des seules contingences de l'histoire. Herbert met ici en scène des antagonistes collectifs au fond de même nature politique et qui ont pour fin, consciente ou inconsciente, la dissolution du sujet individuel dans une communauté uniquement soucieuse de sa propre pérennité. Bien entendu, chacun accuse l'autre d'inhumanité, en toute sincérité. Nils Hellstrom, bien que lui-même donné pour supérieurement intelligent, pense que l'intelligence individuelle finira par disparaître de la Ruche en même temps que le langage parlé, et que c'est à ce prix que cette humanité ultérieure survivra, rejoignant la Nature après un long détour à travers la forêt des concepts inventés. Bref, une forme de la fin de l'Histoire.

La Ruche et l'Agence ont en commun un mobile premier voire unique : la survie à tout prix et en particulier au prix de la mort d'individus éminemment remplaçables.

L'un des aspects les plus surprenants du dossier que l'on peut constituer autour de la Ruche concerne l'éthologie. Lorsque le livre paraît, l'idée d'une transposition à des mammifères des mœurs et modes de reproduction des insectes sociaux semble extravagante bien qu'elle soit recevable dans une fiction.

Or Il est avéré depuis 1981 qu'il existe bien parmi les mammifères une espèce au moins qui a développé une telle technique de survie : les rats-taupes d'Afrique du Sud (Heterocephalus Glaber, famille des Bathyergidés). Ils constituent des ruches souterraines avec des reines qui seules se reproduisent. La longévité de ces rats, de l'ordre de vingt ans, est bien supérieure à celle des autres rongeurs, qui dépasse rarement quelques années. Ces “ruches” peuvent compter jusqu'à une cinquantaine d'individus. Ce qui justifie en quelque sorte a posteriori la spéculation de Frank Herbert. Si leur découverte en tant qu'espèce remonte aux alentours de 1840, leur caractère eusocial n'a été établi que depuis peu et Frank Herbert ne pouvait pas le connaître au moment de la rédaction de son roman. Lorsque j'ai lu pour ma part les premiers articles les concernant au début des années 1990 dans des revues pourtant considérées comme sérieuses, comme le Scientific American, Pour la Science et la Recherche, je dois avouer que j'ai d'abord cru à un canular. Mais les numéros correspondants n'avaient pas été publiés en avril.

Voici l'introduction de l'article de Nathalie Ray, "Les rats-taupes, des mammifères eusociaux" :

« Les rats-taupes (Heterocephalus glaber) ont été découverts dans l'est de l'Afrique (Éthiopie, Kenya, Somalie) en 1842. Ils font partie de la famille des Bathergidés (sic), des Rongeurs. Ils mesurent entre 7 et 8 cm, pèsent entre 25 et 70 g et peuvent vivre de 10 à 30 ans en captivité mais 1 à 2 ans dans la nature. Ils vivent dans les déserts, dans des galeries souterraines de 4 à 7 cm de diamètre, situées de 50 cm à 2 m sous terre. Il s'agit donc d'un environnement hostile, avec des ressources alimentaires dispersées et faibles, un sol dur et sec, une prédation importante (serpents)… Une dispersion et une reproduction indépendante sont donc quasi impossibles.

En 1981, on a découvert que les rats-taupes n'avaient qu'une seule femelle reproductrice, appelée la reine, comme certains insectes (abeilles, fourmis, termites) et qu'ils étaient donc les premiers mammifères eusociaux. L'eusociabilité est définie selon trois critères : la cohabitation d'au moins deux générations, le fait que seuls quelques individus assurent la reproduction de l'espèce, et le fait que les individus non reproducteurs prennent soin de la progéniture des reproducteurs, avec un système de castes. Le problème évolutif qu'ils posent est comment les individus qui ne se reproduisent pas peuvent-ils évoluer ? Une solution a été apportée par Hamilton dans les années soixante avec la sélection de parenté : il y a sélection de la famille et non de l'individu et les ouvriers non reproducteurs augmentent la transmission de leurs gènes en élevant leurs frères et sœurs. [9] »

La suite de cet article porte sur des expériences réalisées en laboratoire sur ces animaux dans des terriers artificiels observés à travers des vitres comme une fourmilière. On notera que suivant les sources, des divergences notables apparaissent, notamment sur la longévité de ces animaux que Nathalie Ray semble sous-estimer dans le cas des variétés eusociales.

Et voici quelques extraits du résumé d'un article publié dans le Canadian Journal of Zoology en 2002 :

« Les rats-taupes africains (Bathyergidæ) constituent un taxon idéal pour l'épreuve de théories évolutives sur les origines et la persistance du comportement social des mammifères parce que, au sein de cette famille, on trouve toute une gamme d'espèces, des espèces solitaires aux espèces eusociales. L'hypothèse de la répartition de la nourriture en fonction de l'aridité… suppose que la socialité chez les Bathyergidae est apparue comme conséquence de l'aridité de l'habitat et des patterns d'abondance et de répartition des géophytes qui ont suivi. Dans les milieux plus arides, la répartition contagieuse de cette ressource alimentaire et le fait que le sol ne soit assez meuble pour creuser des terriers que pour de courtes périodes après les pluies signifient que les risques d'insuccès de la quête de nourriture sont élevés. Ces risques peuvent être diminués dans les cas de quêtes collectives par de grands nombres d'animaux [10] ».

C'est donc bien, comme le suggérait Herbert, l'aridité du milieu, la rareté des ressources et la sélection en vue de la survie qui ont conduit cette espèce à l'eusocialité. On relèvera cependant que dans le cas de la Ruche, c'est la férocité des autres humains, dits sauvages, qui a conduit au moins au départ ses fondateurs à s'exiler de leur société.

La ruche, la fourmilière, la termitière ont été dans la littérature de science-fiction, dès le dix-neuvième siècle et durant tout le vingtième siècle, des métaphores transparentes permettant de porter un jugement critique, généralement négatif, sur la socialisation progressive de l'humanité en marche vers une collectivisation totalitaire [11]. Un ouvrage de l'épaisseur de celui-ci ne suffirait pas à les recenser. Le grand Wells avait déjà abordé le thème en 1901 dans ses Premiers hommes dans la Lune. Dans sa terrible anti-utopie, Nous autres (1920), Zamiatine déplore « la dissolution totale de l'individu dans la société en même temps que la réalisation d'un État aux pouvoirs et aux moyens totalement inconnus » qui évoque fort une termitière [12]. L'un des romans les plus inattendus reste les Formiciens (1932) de Raymond de Rienzi qui met en scène au Jurassique des ancêtres déjà socialisés de nos fourmis, qui disposent encore de l'intelligence individuelle et de la parole, anticipant exactement sur la transformation décrite pour les humains dans la Ruche d'Hellstrom. La même année, Aldous Huxley, dans le Meilleur des mondes, décrit une humanité en voie de différenciation biologique. Robert Silverberg lui fait écho dans les Monades urbaines [13] (1971). Dans ses deux romans injustement méconnus, Humanité et demie (1971) et le Dieu-baleine [14] (1974), T.J. Bass dresse un tableau vivant et plus fouillé que l'esquisse de Herbert d'un avenir lointain où l'entomologisation de l'espèce humaine est presque achevée. En France, dans le Voyageur imprudent (1943), René Barjavel brosse à grands traits un futur sinistre de l'humanité calqué sur la fourmilière. Enfin, plus récemment, dans sa trilogie des Fourmis [15] (1991-1995), Bernard Werber livre sa version, sur fond de myrmécophilie, du conflit entre humains et insectes sociaux.

Ce qui distingue le roman de Frank Herbert et, dans une moindre mesure, ceux de T.J. Bass de la plupart des autres, c'est qu'ils ne visent à transmettre aucun message politique ou sociologique. Ils spéculent sur un avenir bio-social possible de l'humanité sans le condamner, l'exalter ni le déplorer. Herbert parvient à un tel point d'empathie avec les membres de la Ruche qu'il réussit presque à nous les rendre sympathiques bien qu'ils n'hésitent pas, pour le plus grand bien de leur collectivité, à enfreindre les tabous ordinaires de l'humanité, les interdits du meurtre, du cannibalisme, de l'instrumentalisation du corps humain et de la sexualité. Malgré cela, ils nous apparaissent progressivement comme “innocents” et en un sens comme plus vulnérables, voire comme plus humains que les collaborateurs de l'Agence, représentants d'un État comploteur, policier et répressif.

Ce qui me frappe, enfin, c'est l'opposition complète entre les conceptions de la fin de l'humanité chez Clifford Simak et chez Frank Herbert. Pour Simak, dans Demain les chiens, l'humanité se dissout à force d'individualisme à la Max Stirner. Protégés par leurs robots, disposant de l'infinité des mondes vierges, les humains se séparent, s'isolent, se dispersent « aux quatre vents de l'éternité », laissant « la terre aux robots et aux Chiens » [16]. À l'opposé, la secte de la Ruche dissout l'humanité dans un retour à la nature à travers une extrême socialisation. Deux grands mythes de l'homme s'affrontent ici, qui ont déchiré le vingtième siècle.

Notes

[2] Assez curieusement, la musique du film, composée par Lalo Schifrin, ne sera éditée sur CD qu'en 2003 (Aleph Records). Le film est disponible en VHS.

[3] On la trouvera en même temps qu'un choix excellent des œuvres de cet auteur et qu'une intéressante préface de Jacques Goimard dans le volume les Mines du temps, Omnibus, 2004.

[4] Bien entendu, les Fourmis interviennent plus tôt dans Demain les chiens, dès le troisième conte publié en 1944. On se souvient qu'un mutant construit une cloche de verre qui permet à une fourmilière de passer l'hiver et de se doter d'une civilisation technologique. À terme, les Fourmis ont construit un immense édifice dont le robot Jenkins constate l'abandon et la ruine dans le dernier conte.

[5] Sur les thématiques de Frank Herbert, voir ma présentation du cycle de Dune, "Ailleurs et demain/la bibliothèque", Robert Laffont 2003.

[6] Sur les entreprises de L. Ron Hubbard, lire un ouvrage solidement documenté, Ron Hubbard, le gourou démasqué, de Russel Miller, édition française (malheureusement peu disponible) chez Plon, 1993. Les rapports entre Dianétique et Scientologie sont un peu plus complexes qu'il n'est indiqué ici.

[7] Cf. ma présentation du Cycle de Dune, opus cité.

[8] Ce dard — qui est un moyen de provoquer des tremblements de terre à distance — pourrait avoir été inspiré aux chercheurs de la Ruche ou à Frank Herbert par certains travaux ou plus exactement certaines conjectures de Nikola Tesla (1856-1943). Génie excentrique et grand spécialiste de l'électricité et de ses applications, inventeur notamment du moteur à induction, mort pauvre, ignoré et à demi fou, il prétendit avoir imaginé une arme susceptible de détruire un édifice à n'importe quelle distance à travers la terre. Comme il connaissait mieux que personne de son temps l'électromagnétisme mais qu'on n'a pas retrouvé de notes détaillées, on peut supposer qu'il avait spéculé sur de possibles résonances du champ magnétique terrestre ce qui correspond assez bien aux quelques indications fournies par Herbert. Il avait précisément inventé le résonateur électrique Tesla qui permet d'obtenir des tensions très élevées, jusqu'à plusieurs millions de volts.

[9] Revue de biologie générale, janvier 2002, rapport de maîtrise accessible sur la toile. Les rats-taupes ont d'ailleurs proliféré sur la Toile, pas toujours sur le mode sérieux.

[10] Steven C. Le Comber, Andrew C. Spinks, Nigel C. Bennett, Jennifer U.M. Jarvis, et Chris G. Faulkes,

[11] On retrouve cette métaphore sous les plumes les plus inattendues. Ainsi Dostoïevski condamne, dans ses "Remarques hivernales sur des impressions d'été", publiées dans le Temps de février et mars 1863, Londres et le capitalisme dans lequel il voit : « cette puissance épouvantable qui agglomère en troupeau des hommes innombrables venus de tout l'univers ; ce triomphe de Baal ; cette instauration définitive de la Fourmilière. » Et Pierre Pascal, dans son introduction à Crime et châtiment (Garnier, 1958) de noter que pour Fedor Dostoïevski, « c'est la Russie qui, tournant le dos également à la fourmilière du capitalisme et au phalanstère du socialisme, trouvera la voie vraie : la personne humaine libre dans une société fraternelle. » On notera la curieuse inversion par rapport à l'usage le plus courant de la métaphore. Ici, c'est le capitalisme qui mène à la Fourmilière alors que c'est d'habitude plutôt le collectivisme.

[12] Claude Mouchard, article "Contre-utopies" dans le Dictionnaire des utopies, Larousse 2002.

[13] Le Livre de Poche nº 7225

[14] Le Livre de Poche, nº 7042 et 7050.

[15] les Fourmis, le Jour des fourmis, la Révolution des fourmis, le Livre de Poche, nº 9615, 13724 et 14445.

[16] Demain les chiens, huitième conte, opus cité.