Chroniques de Philippe Curval

Jacques Barbéri : l'Homme qui parlait aux araignées

nouvelles de Science-Fiction

chronique par Philippe Curval, 2008

par ailleurs :

Vingt-trois ans après la parution de son premier recueil, Kosmokrim, Jacques Barbéri récidive avec un ensemble de dix-sept nouvelles qui témoignent de son talent à révéler le plus profond de ses rumeurs intimes. Par rumeur intime, j'entends cette capacité à convertir ses rêves, ses hantises, ses obsessions en une matière littéraire sombre, fiévreuse qui coupe court à tout rapprochement avec l'autofiction.

À ces fins, Barbéri ne s'embarrasse d'aucun préjugé. Il traite de la SF comme s'il s'agissait du Fantastique et vice versa, brasse les genres avec virtuosité. Tantôt brutale, tantôt complexe et raffinée, inventive surtout, son écriture donne une vraie réalité à ses histoires qui frôlent les délires du sommeil artificiel. Par leur aspect organique et viscéral, par le caractère déjanté de ses personnages en dérive dans un univers où les apparences sont trompeuses et leurs conséquences improbables, ses nouvelles sont autant de flashes sur l'inconscient. Mais les araignées psychopathes comme les autres créatures bizarres qui les peuplent, les machines et les situations “limites” qu'il nous propose sont soutenues par une logique sous-jacente. Et, si noirs qu'ils soient, si insolites qu'ils apparaissent, ses textes laissent sourdre un humour, une verve à la Tex Avery. En cela, Jacques Barbéri n'a pas son pareil parmi les écrivains français de Science-Fiction.

Si ce recueil vous a séduit, n'hésitez pas à lire son roman Narcose qui paraît en même temps. Sa réédition revue et augmentée en trois volumes promet des surprises.

Philippe Curval → le Magazine littéraire, nº 475, mai 2008