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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 51 le Chant de Susannah

Keep Watching the Skies! nº 51, septembre 2005

Stephen King : le Chant de Susannah (la Tour sombre – 6)

(Song of Susannah (the Dark tower – 6))

roman de Fantasy

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chronique par Philippe Paygnard

La quête de la Tour Sombre que mène le Ka-Tet de Roland de Gilead n'est pas encore arrivée à son terme, mais on sent bien, à la lecture de ce sixième et avant-dernier volume de la saga, que la conclusion approche à grands pas. Stephen King a beau essayer de multiples subterfuges, l'intrigue n'avance pratiquement plus et n'attend guère qu'un épilogue pour combler personnages et lecteurs.

Pour autant, cela ne veut nullement dire qu'il ne faut pas lire le Chant de Susannah, suite directe des Loups de la Calla. À la fin de cet épisode, Susannah, possédée par un esprit maléfique et enceinte des œuvres d'un démon, avait abandonné ses compagnons de route, après leur victoire sur les Loups. Sans un mot pour Eddie, son mari, elle franchissait le passage lui permettant de quitter l'Entre-Deux-Mondes pour plonger vers le New York de 1999. Maintenant, Roland, Eddie, Jake, Ote le bafouilleux et leur nouvel associé, le Père Don Callahan vont devoir se séparer pour mener de front deux missions décisives. D'une part, il leur faut protéger la Rose de New York, symbole de la Tour, et d'autre part ils doivent retrouver Susannah avant qu'elle n'engendre un démon. Jake, Ote et le Père Callahan doivent mener cette seconde mission, véritable course contre la montre, tandis que Roland et Eddie partent à la recherche de Calvin Tower, l'homme qui possède le petit bout de terrain sur lequel pousse la Rose. De multiples obstacles vont, bien évidemment, se dresser sur la route de nos pistoleros et rien ne dit qu'ils seront tous présents pour découvrir les secrets de la Tour Sombre.

Véritable nexus de l'œuvre de Stephen King, le cycle de la Tour Sombre évolue et se métamorphose au gré des pages. Après avoir plongé personnages et lecteurs dans l'ambiance western des Loups de la Calla, Stephen King ramène tout son petit monde dans des univers nettement plus contemporains. Le Père Callahan, Jake et Ote le bafouilleux — que tout le monde a l'air de prendre pour un chien — se retrouvent ainsi à New York à la poursuite de Susannah, tandis que Roland et Eddie sont à quelques années de là, en 1977, du côté de Bridgton, dans le Maine. La quête de la Tour Sombre se divisant en deux sous-quêtes, King nous fait suivre, en alternance, Susannah qui lutte contre l'esprit qui le possède, Roland et Eddie à la recherche de Calvin Tower et le trio Jake-Ote-Callahan à la poursuite de Susannah. Cette construction ralentit forcément la progression de l'histoire et rend la lecture de ce sixième volet de la saga quelque peu laborieuse. Usant et abusant du vocabulaire très spécial qu'il a imaginé au fil des cinq tomes précédents, Stephen King ne vient nullement en aide à ses lecteurs. À croire que notre romancier préféré veut faire du Concordance de Robin Furth le vade-mecum de tout lecteur de ce volet de la Tour Sombre.

Fort heureusement, le Chant de Susannah n'est pas le plus épais des chapitres de la Tour Sombre. C'est un récit assez bref qui contient suffisamment de révélations sur les multiples personnages et les différents mondes orbitant autour de la Tour Sombre pour passer outre les quelques obstacles précités.

Comme dans les ouvrages précédents, Stephen King multiplie les références croisées aux différents récits du cycle et à d'autres ouvrages de sa bibliographie. Il rappelle ainsi au passage que Jake possède le pouvoir du Shining et que le Père Callahan a affronté les vampires de Salem avant de s'exiler dans l'Entre-Deux-Mondes. Mais cette fois, il va encore plus loin en introduisant au cœur de son œuvre un personnage très particulier, celui de l'écrivain lui-même, Stephen King en personne. Le créateur se trouve ainsi face à ses créatures et leur raconte comment et sous quelles influences il les a engendrées. Un bien étrange jeu de miroirs dont le romancier se sort par une ultime pirouette assez étonnante dans le chapitre final intitulé "Journal de l'auteur".

À noter enfin que cette édition contient, comme le volume précédent et les dernières rééditions du cycle, un cahier central réunissant une dizaine d'illustrations. Alors que Berni Wrightson, également auteur de bandes dessinées, avait fait un travail éminemment explicite sur les Loups de la Calla, le trait de Darrel Anderson, graphiste et designer, reste volontairement flou et énigmatique. Mais ce n'en est que mieux car ce n'est qu'après la lecture du Chant de Susannah que l'on peut décoder la symbolique de ses illustrations puissantes et ensorcelantes.

Pour l'essentiel le Chant de Susannah semble donc n'être qu'un récit de transition, une sorte de prologue à l'épilogue qui se profile. Il ne reste donc plus qu'à attendre le mois de septembre 2005 pour découvrir les derniers secrets de la Tour Sombre ou bien, pour les anglophones et les plus pressés, se procurer la version originale the Dark Tower VII: the Dark Tower qui est paru, depuis septembre 2004, dans une version illustrée par Michael Whelan co-éditée par Donald M. Grant et Scribner, et dont la version trade paperback paraît en juillet 2005 chez Scribner.

 lire par ailleurs dans KWS [1] [2]