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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 8 Nouvelles de leur involontaire séjour sur la Terre

Keep Watching the Skies! nº 8, juillet 1994

Sylvie Aubriot : Nouvelles de leur involontaire séjour sur la Terre

recueil de Fantastique ~ chroniqué par Micky Papoz

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Sylvie Aubriot fit ses premières armes, ou plutôt, vit ses premières nouvelles publiées dans Poivre noir, fanzine dévolu en particulier à la nouvelle et dont j'étais la rédactrice à l'époque. Sylvie fut aussi une des grandes lauréates du concours annuel de nouvelles, lancé par mon association en ce temps-là. C'était il y a dix ans. Déjà… Il me semble que c'était hier. Depuis Sylvie Aubriot a publié un gros roman les Pierres de l'ombre, paru aux éditions La Mirandole, puis par tendresse, elle est revenue à la nouvelle et ce recueil en est le plus parfait aboutissement. Sylvie est un de ces écrivains qui vivent essentiellement pour l'écriture et ne conçoivent l'existence qu'un stylo à la main. Délicatesse, fraîcheur de l'âme, force et précision dans les mots et les phrases qu'elle emploie avec la même élégance qui fleurit son cœur. Quand on lui demande pourquoi elle écrit, l'Ardéchoise cœur fidèle répond : « Je tente de construire un abri dans ma tête pour rester éveillée, pour forcer les contrastes, pour faire le monde malgré lui. Pour relancer mon cœur lorsqu'il faiblit, pour avoir moins peur, pour hanter d'autres vies. ». On comprend mieux pourquoi elle manie sans complaisance ces destins nés de son imaginaire, tranches de vie dont elle nous décortique d'infimes instants souvent douloureux où la mort épie les protagonistes. Fragiles destinées qu'un seul "Grain de sable", titre de la première nouvelle, peut faire basculer. Méfions-nous du vent qui fantasme et de ses caprices. Il peut être aussi pernicieux que le sable dans lequel on vient de planter un parasol meurtrier. Dans "une Autre nuit", Sylvie nous emporte au pays de l'enfance et des souvenirs champêtres, mais ce n'est plus la mort, mais la folie qui possède les griffes de la fatalité. Photos jaunies d'une "Dernière heure", d'un ultime souffle de vie. Bavures d'encre pâlie d'un professeur. Diane et son musicien flûtiste, amour de jeunesse, passion brisée jusqu'au vertige du saut dans le vide diabolique. Le texte "Dix francs" nous fait souvenir d'une certaine petite marchande d'allumettes que l'on retrouva morte de froid sur le trottoir un soir de Noël, après qu'elle a vécu mille merveilles. "Coup de filet", c'est le piège gluant, ou la manière d'aimer la nature et ses insectes jusqu'à se transformer en chrysalide. Poussière de nuit aux ailes de poudre. La passion de la spéléologie conduit Sylvie a nous parler d'une géode, piège mortel où dormiront deux jeunes mariés, amants pour l'éternité.

On tourne les pages de ce recueil et on savoure les quatorze textes, autant de soupirs de vies et morts inconscientes, autant d'admiration pour l'auteur. Ces brèves histoires du temps sont marquées par les quatre éléments : la terre, l'eau, la mer et le feu. Toute une alchimie où se mêlent fiction et réalité qui vient parfois la dépasser. La vie est fragile et de sa plume inexorable, l'auteur nous raconte comment elle peut être coupée comme une fleur. Le fantastique est présent, c'est celui de la destinée, souvent absurde. L'amour entraîne inexorablement la mort de ceux qui ne font qu'un séjour involontaire sur Terre.