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Michel Jeury : la Conspiration des Trois-Noms

Intégrale des nouvelles

la Soucoupe du jugement

Dans la première maison que je visitai, à la recherche d'improbables survivants, je découvris une pendulette à quartz, avec un calendrier automatique incorporé qui indiquait le 17 mai : quatre jours après la foudroyante attaque des extraterrestres… Je n'avais pas eu conscience du temps qui passait, depuis l'éclair du 13 mai. C'était arrivé vers onze heures du matin, sous un ciel bleu annonciateur de l'été. Naturellement, cela ne prouvait rien. L'année dernière, juin avait été froid et humide, avec de la neige en altitude et des gelées matinales dans la plaine, après quinze jours magnifiques à la fin de mai… Je me demandais avec angoisse si la même chose allait se produire cette année. Mes amis paysans étaient pessimistes. Quant à la science officielle, on pourrait croire que les ballons-sondes ne lui servent qu'à nier l'existence des ovnis… Je ne regardais même plus la météo sur Antenne 2 !

Une nuit d'observation était prévue pour le 16. J'espérais au moins que le beau fixe tiendrait jusqu'à cette date et que le ciel serait clair, bien que cela n'ait pas vraiment d'importance : quand les extraterrestres souhaitent se manifester, ils le font dans des conditions telles qu'on ne peut manquer de les voir ou de les entendre. De toute façon, je n'attendais aucune manifestation importante cette nuit-là. Les circonstances ne seraient pas favorables, avec plus de cinquante pour cent d'amateurs, parmi lesquels se glisseraient bien quelques adversaires ou tout au moins quelques malheureux intoxiqués de la propagande anti-soucoupes. D'un autre côté, je n'avais pas eu de contact depuis plusieurs semaines, et mes amis d'Ummo profiteraient de la situation pour m'adresser un message…

Eh bien, le message était arrivé, avec quelques heures de retard : dans la matinée du 17 ! J'étais prévenu. Je n'avais pas le droit d'être surpris. Ce qui ne m'a pas empêché, quand j'ai vu l'éclair violet, d'avoir la gorge serrée et le cœur fou. Je portais autour du cou le collier de métal que les Ummons m'avaient donné pour me protéger. J'ai été ébloui et une onde de chaleur a parcouru tout mon corps, mais je n'ai ressenti aucune douleur. Je ne distinguais plus qu'une grosse tache mauve palpitante au milieu d'un ciel de velours noir… J'aurais dû prendre des lunettes sombres en prévision de l'attaque : les Ummons me l'avaient aussi conseillé. Je me demandais si j'allais rester aveugle… Je me souvins aussitôt d'un autre conseil que m'avaient donné les humanoïdes venus de Wolf 424 : boire beaucoup d'eau salée… si toutefois je survivais à l'éclair violet… C'était un samedi matin. Samedi… On avait trouvé le calendrier hier, non : avant-hier. On était le 19 mai. Demain, pensai-je, il y aura une semaine que l'attaque a eu lieu et je suis sans doute le seul survivant !

J'étais en congé et je me promenais à cinq cents mètres environ de chez moi. Les bois étaient trop secs pour qu'il y ait des champignons. J'avais pourtant exploré la petite charmille, à l'est du village, où les girolles abondaient à la saison… Je n'avais rien trouvé. Je revenais. Je marchais dans un chemin entre le bois et un pré, me dirigeant vers la route. Je réfléchissais certainement. À quoi ? Je ne le saurais jamais et c'est sans importance… Mais j'ai eu beaucoup de chance. Trop de chance même. Était-ce le hasard… Je tremble encore d'horreur à l'idée que j'aurais pu être n'importe où, loin de chez moi, au moment de l'éclair. Combien de temps m'aurait-il fallu pour me procurer de l'eau et du sel ? Je me suis mis à courir comme un fou vers la maison, qui était à moins de cinq cents mètres. Malgré l'éblouissement de l'éclair, je pouvais me diriger tant bien que mal et éviter les plus gros obstacles. Cependant, je me suis cogné plusieurs fois contre une barrière ou un arbre, je suis tombé dans un fossé, je me suis étalé sur la route… Je n'entendais aucun bruit. Je n'ai pas croisé une seule voiture… Les autres, les humains, tous les humains, déjà morts — tous ?

Mais je n'avais pas le temps de penser aux autres. J'étais plus seul que je ne l'avais jamais été. Mes amis d'Ummo avaient fait leur possible pour me sauver, mais ils n'avaient pas hésité à détruire l'humanité qui était une menace pour eux et ils m'avaient laissé seul. À condition que je survive, et ce n'était pas encore gagné !

Quand je suis arrivé chez moi, ma vision était presque rétablie ; mais dans mon affolement, j'étais incapable de mettre la main sur le sel. Une voix désespérée criait dans ma tête : Vite ! C'est peut-être une question de minutes, ou de secondes… s'il n'est pas trop tard !

Le sel, le sel ! J'aurais dû prévoir, bien sûr… Je commençais à étouffer. Je ne savais pas si c'était un effet de l'attaque ou un effet de la terreur que je ressentais. Avec quoi les Ummons avaient-ils foudroyé la Terre ? Qu'était-ce au juste que ce rayon violet ?

Je trouvai enfin une boîte de sel fin que je vidai dans une carafe d'eau. Je bus… et Dieu que c'était mauvais. Je fis un effort pour ne pas recracher. C'était trop salé… mais était-ce assez salé ? Combien de cette mixture fallait-il boire ? Je me rappelai finalement que j'avais un paquet de sel dans le placard aux conserves. Je fis plusieurs litres de mélange que je m'obligeai à avaler par petites gorgées. Les larmes coulaient de mes yeux brûlants. Je me sentais dévoré par des radiations inconnues. J'avais perdu trop de temps. Le sel ne pouvait plus me guérir.

Je touchai le collier des Ummons, que je portais à même la peau, comme Éphraël me l'avait indiqué. Éphraël était le chef des humanoïdes, mais je suppose qu'il ne s'appelait pas réellement ainsi. Il avait choisi pour se présenter à moi un pseudonyme à consonance biblique. Peu importait. Le collier était chaud et légèrement bosselé par endroits, comme si on l'avait frappé à coups de marteau… Il avait servi.

Peut-être serais-je sauvé tout de même ? Je me remis à boire de l'eau salée. Je vomis plusieurs fois. Et plusieurs fois, je remplis la carafe d'eau puis vidai une grosse poignée de sel dedans. Tout ce sel aurait dû produire une forte rétention d'eau ; peut-être était-ce le but recherché. Pourtant, j'urinais beaucoup… Le temps passait. Plus tard, je fus pris de coliques douloureuses ; mais j'avais cessé de vomir. Puis, je n'eus plus de sel. Je mis à fondre du gros sel de cuisine… Je regardai l'heure pour la première fois, je crois bien, depuis l'éclair. Presque cinq heures de l'après-midi. J'avais survécu !

Le soir tombait… Non, impossible. Le temps était couvert à cause de l'attaque extraterrestre. Un ciel de fin du monde. Et c'était la fin du monde… Je songeai à courir au village pour acheter du sel. Mais je ne tenais guère sur mes jambes. Et puis, acheter… Il n'y avait certainement personne pour me vendre du sel ou n'importe quoi d'autre. Personne, jamais, plus pour vendre ou acheter. J'étais seul. Je pouvais aller au village, entrer dans le bistro-épicerie de la mère Lagrange et me servir tout seul… Tout seul. J'étais seul. Et puis, il y aurait le corps de la patronne. Dans quel état..? D'autres corps, peut-être, sur la route, sur la place du village ou à la terrasse du café. Presque tous ces cadavres seraient ceux d'une bande d'imbéciles, en partie responsables de leur mort, par leur refus de regarder la vérité en face et d'admettre l'existence des extraterrestres. Ils l'avaient cherché ! Et quelques-uns m'avaient mené la vie dure. Je n'étais pas très sûr que la vue de certains corps m'aurait affreusement chagriné… Mais il y avait les enfants. Les enfants croyaient aux ovnis ! Et la mère Lagrange ! Une brave femme, sensible et intelligente… Malgré son âge, elle comprenait que notre civilisation, orgueilleuse et stupide, n'était pas la première qui ait existé sur la Terre, ni même la plus puissante, ni peut-être la plus orgueilleuse. Et elle savait d'instinct — son instinct de vieille paysanne — que le ciel n'était pas vide. Son esprit simple et droit n'avait jamais été déformé par les imbécillités de la science officielle. Et pourtant, elle serait morte comme les autres… Onze heures du matin : elle serait peut-être tombée en servant le pastis quotidien des frères Gamarra. Les Gamarra, ces sauvages ricaneurs… Une soucoupe se serait posée au milieu de leur troupeau, ils auraient refusé de la voir. Et un débarquement d'extraterrestres dans leurs prés, entre onze heures et midi, ne les aurait pas empêchés de siroter tranquillement leur éternel pastis. Fini, tout ça. Les Gamarra étaient morts et j'avais une chance de trouver leur cadavre au bistro du village !

Je n'arrivais pas à me décider. Je me sentais de plus en plus faible. J'avais encore une demi-carafe d'eau salée devant moi. Je buvais machinalement, la main gauche calée sur l'estomac. La nuit était venue, avec au moins deux heures d'avance. Je voulus allumer l'électricité. J'éclatai de rire. Plus d'électricité, le jour de la fin du monde ! Et pourtant… Il me semblait avoir entendu ronronner le réfrigérateur un moment plus tôt. Je décidai de ne pas bouger. Une sorte de sursis. Le silence était total, mais cela ne prouvait rien.

Je posai les coudes sur la table et m'endormis là, le visage entre les bras, bercé par la nausée.

Le jour me réveilla. Du moins, c'est l'impression que j'eus. J'étais mal dans ma peau, trempé, souillé. J'avais dû me pisser dessus pendant mon sommeil ! Et… Je jouai quelques minutes à croire que j'avais eu un cauchemar, que la vie continuait. La vie, le monde… Mais, beaucoup d'heures s'étaient écoulées. La nuit entière, pensai-je. Je ne savais pas encore que j'avais dormi près de quatre jours. Je n'étais pas mort ! La thérapeutique des Ummons avait marché ! Naturellement. Pourquoi avais-je douté ? Ils connaissaient les effets de leur rayon et aussi l'antidote…

Toujours le silence. J'essayai de gagner quelques secondes. À quoi bon ? Je me levai. J'avais mal à la tête et à l'estomac. Je me tins debout avec peine, voûté par les courbatures… Il restait un peu d'eau salée au fond de la carafe. Je la vidai dans l'évier. Maintenant…

J'avais besoin de prendre une douche le plus vite possible. Je me traînai à la salle de bains. Heureusement, j'avais un chauffe-eau à gaz. Ma montre était arrêtée. Le réveil à piles indiquait 9 h 55. Je croyais être encore au 14 mai… J'esquissai un geste vers le transistor posé sur le buffet. J'étais à peu près sûr qu'il n'y avait pas de survivants. Les représentants du gouvernement et de la science officielle n'auraient jamais l'occasion de débiter sur l'antenne leurs âneries et leurs mensonges ! S'ils avaient pu, ils auraient certainement nié l'éclair violet… Mais, de toute façon, personne ne pouvait plus écouter leurs salades.

Je pris une douche.

Après, je regardai le ciel par la fenêtre et je me rendis compte que j'avais très faim. Le temps était beau, à peine un peu couvert. Je faillis vomir de nouveau en buvant un verre d'eau, pourtant, elle n'était pas salée. Il n'y avait presque plus de pression au robinet. Le chauffe-eau fonctionnait mal et j'avais eu beaucoup de peine à me doucher. Mais c'était sans importance. Vraiment. Le réfrigérateur puait, ce qui était plus sérieux. Cela m'étonna cependant un peu : je croyais qu'il s'était écoulé moins de vingt-quatre heures depuis l'attaque. Je déjeunai finalement de deux œufs sur le plat.

Je n'étais pas pressé. J'avais tout mon temps, désormais… Plus besoin d'aller au centre de postcure où je travaillais. Tous les pensionnaires du centre avaient subi une cure définitive. Je songeai sans plaisir à leur disparition : beaucoup d'entre eux croyaient aux ovnis et n'avaient pas mérité ça… Soudain, j'éclatai de rire. On était dimanche — en réalité, c'était mercredi, mais je ne l'appris qu'un peu plus tard… —, et j'avais bien le droit de me reposer ! Il n'y aurait pas de messe au village, ni ailleurs. Tout ce que je pouvais faire, c'était de me reposer. Et attendre… Pas d'enquête à mener, ni d'observation à organiser. Des notes à classer ? À quoi bon, maintenant ?

Si ! Il y avait un problème urgent à régler : celui de ma propre survie. Les Ummons avaient voulu que je sois sauvé. Je n'avais pas le droit de refuser ce cadeau. Et il me fallait agir vite, avant que tout ne soit trop détérioré… Par exemple, je savais qu'il existait dans la région des maisons construites par des bricoleurs écologistes, et qui disposaient d'une autonomie complète en énergie. Je devais en cherche une et m'y installer. J'avais lu un article sur une villa équipée d'une éolienne, d'un chauffage solaire et je ne sais quoi encore… On pouvait sans doute repérer l'éolienne d'assez loin. Non. Ce n'était pas la bonne méthode. Mieux valait chercher l'article en question. Au pire, je serais obligé d'aller à Bordeaux, au siège du journal, pour feuilleter la collection.

Il me parut soudain urgent de réaliser ce projet. Puis je pensai aux cadavres et mon enthousiasme baissa aussitôt. Je ne me décidai à sortir qu'une heure plus tard environ.

Je ne fus pas très surpris de trouver le village désert. Le bistro de la mère Lagrange était vide. Une bouteille de pastis avait roulé sur le plancher sans se casser. Sur une table de l'entrée, deux verres à demi pleins d'un liquide trouble, jaunâtre, étaient disposés l'un en face de l'autre, abandonnés à jamais par les buveurs d'onze heures du matin. Les frères Gamarra étaient partis sans avoir eu le temps de finir leur apéritif…

Partis ? En fumée ? Non seulement le rayon violet des Ummons foudroyait les Humains, mais il détruisait leur corps jusqu'à la dernière molécule. Et les animaux ? Je n'avais pas vu une seule vache dans les prés, vivante ou morte. Une ferme jouxtait le bistro. Vide aussi. Aucune trace du bétail. J'aperçus cependant quelques volailles effrayées qui s'enfuirent à mon approche. Un lapin affamé tapait du pied dans sa cage, seul survivant du clapier. Je vis aussi quelques oiseaux et un écureuil… Les insectes, mouches, abeilles, guêpes, criquets, libellules, ne semblaient pas touchés par le phénomène… Les bâtiments, le mobilier et les installations diverses, semblaient intacts. Le monde était devenu un désert bucolique.

Je visitai deux ou trois bourgs et une douzaine de maisons. Je ne trouvai nulle part la moindre charogne — sauf dans les réfrigérateurs que j'ouvrais. La viande crue ou cuite, abandonnée par les ménagères qui préparaient le repas de midi du 13 mai, avait été momifiée. Elle présentait l'aspect bien connu de la vieille semelle racornie. Cela me fit un peu rire… Pas longtemps. Je pensai à Élisabeth. Un samedi matin, elle avait peut-être été surprise aussi par l'éclair pendant qu'elle faisait sa cuisine. Elle m'avait quitté depuis environ huit mois, peu après mon troisième contact. Aurais-je pu la sauver si elle était restée avec moi ? Ephraël ne m'avait donné qu'un seul collier… Peut-être savait-il qu'Élisabeth allait partir bientôt. J'ai eu souvent l'impression que les Ummons connaissaient au moins partiellement l'avenir. Notre avenir… Je n'ai jamais pu savoir si Élisabeth croyait aux extraterrestres. Des Elohim, elle n'admettait à coup sûr que la première syllabe : EL, effet lumineux. Elle était sceptique quant aux Objets Habités et Influences Magnétiques. Et elle refusait absolument l'idée d'un contact rapproché avec les “petits hommes verts” (mais les humanoïdes venus de la quatrième planète de Wolf 424, l'étoile Iumma, n'étaient ni verts ni tellement petits…). J'inscrivis à mon programme des prochains jours une visite à l'appartement qu'elle partageait depuis peu avec un représentant en machines agricoles au chômage. Je ne les trouverais ni vivants ni morts. À moins que… Une exception était toujours possible, mais je n'y croyais pas beaucoup.

De toute façon, ce n'était pas urgent. Je décidai d'aller voir d'abord Francis et Marie-Hélène, qui étaient mes meilleurs amis — ou du moins l'avaient été — et n'habitaient pas trop loin. Les voir ? Je gardais néanmoins une certaine espérance. Tous les deux avaient été enlevés six mois plus tôt par l'équipage d'une soucoupe : des humanoïdes assez différents des Ummons. Ces êtres étaient d'assez grande taille, avec la peau grise, de grosses têtes oblongues, des yeux ronds, de simples fentes pour le nez et la bouche… Ils étaient vêtus de combinaisons bleues, analogues à celles de Ummons, ornées d'un badge qui représentait un oiseau inconnu. (L'insigne des Ummons était formé de trois orbites planétaires entrecroisées…) Nous nous sommes souvent demandé s'il existait plusieurs races parmi les visiteurs de la Terre. Je suis persuadé du contraire. Ce sont les jeunes qui s'ingénient Dieu sait pourquoi à nous apparaître différents, divers, contradictoires, incohérents. Et je crois moi qu'ils viennent d'une planète nommée Ummo, gravitant autour d'une étoile qu'ils appellent Iumma, et qui est pour nous l'étoile Wolf 424. Et ce sont eux qui ont exterminé la race humaine avant qu'elle ne transporte le virus de la guerre dans l'espace galactique.

Interrogée sous hypnose, Marie-Hélène a retrouvé les souvenirs que les extraterrestres avaient oblitérés dans sa mémoire. Les souvenirs de l'enlèvement, du dialogue avec le chef des humanoïdes, et aussi de l'examen puis du viol qu'elle avait subis dans la soucoupe. Un humanoïde lui avait badigeonné la poitrine et le ventre avec une crème piquante. Elle avait ressenti alors une excitation intense et n'avait pu résister quand l'être d'un autre monde l'avait pénétrée tranquillement. Son sexe était à peu près semblable à celui d'un homme, mais il lui avait paru très froid. Elle avait frissonné et s'était mise à trembler pendant qu'il la prenait… Elle était persuadée que toutes les femmes enlevées par des extraterrestres avaient été violées comme elle-même. Certains ufologistes partagent cette conviction. Pourquoi ? Une idée assez répandue est que les humanoïdes ont l'intention de procréer des métis. Dans le cas de Marie-Hélène, l'expérience aurait échoué, car la jeune femme n'était nullement enceinte… Mais avant le viol, le chef des humanoïdes l'avait auscultée à l'aide d'un curieux instrument triangulaire qu'il avait introduit successivement dans tous les orifices de son corps. Il lui avait aussi enfoncé une longue aiguille dans le nombril… À mon avis, il existait une chance, une très faible chance, pour que cet examen eût été en réalité un traitement destiné à immuniser Marie-Hélène contre les effets des rayons violets. Les extraterrestres avaient pu estimer qu'une jeune et jolie femme n'accepterait jamais de porter pendant des mois sur sa peau satinée et fragile, un collier de métal disgracieux. En conséquence, ils auraient pu décider de protéger leur éventuelle progéniture d'une autre façon… C'était assez improbable mais je me raccrochais un moment à cet espoir.

Je savais désormais que plusieurs jours s'étaient écoulés depuis l'attaque. Dans l'hypothèse où Marie-Hélène avait survécu, sans doute avait-elle dormi aussi quelque temps. Quoi qu'il en soit, je devais me dépêcher si je voulais la rencontrer avant qu'elle soit définitivement partie de chez elle… À moins que… Peut-être n'aurait-elle pas les mêmes réflexes. Une femme tient à sa maison. Peut-être essaierait-elle de s'installer chez elle pour une longue survie. Et je devais la convaincre de partir…

Je me rendis à un petit garage des environs où je pus faire le plein de ma 4L en fixant un levier à main à la pompe. Il y avait ici et là quelques voitures accidentées. D'autres étaient abandonnées dans les parkings ou sur le bas-côté des routes. Au garage, j'aurais pu me servir. Mais à quoi bon ? Les grosses voitures ne m'avaient jamais tenté. Par contre, j'aurais besoin d'un bon fourgon pour déménager et transporter des marchandises. Je pensais aux survivants du film Demain les mômes. Je voyais ma vie comme celle du héros, retranché dans sa ferme-forteresse. Sauf que je serais très probablement tout à fait seul. Je n'essaierais même pas de lancer des appels radio.

Je roulai un quart d'heure environ sans incident sur une route déserte, puis je trouvai un semi-remorque en travers de la chaussée. Je dus m'arrêter, faire demi-tour et chercher une déviation. Je conduisais lentement, avec une extrême prudence : le moindre accident aurait pu avoir des conséquences dramatiques. Je décidai d'ailleurs d'entrer dans la première pharmacie que je rencontrerais pour me constituer une trousse d'urgence. Précaution dérisoire mais tout de même indispensable.

Plus je m'éloignais de chez moi, plus l'angoisse me gagnait. La recherche d'une habitation serait très dure. Et maintenant, je ne pouvais m'empêcher de me poser la question que j'avais chassée de mon esprit : pourquoi les Ummons m'avaient-ils épargné ? La pensée qu'ils m'avaient choisi pour être le nouvel Adam de l'Humanité me fit sourire amèrement. Marie-Hélène serait-elle Ève ? Je n'y croyais guère et pourtant je me sentais déjà écrasé par cette incroyable responsabilité. Quelles qualités les extraterrestres ont-ils voulu que je transmette à mes descendants ? Eh bien, j'en vois au moins une, mais je ne sais comment la définir. C'est un mélange d'honnêteté et d'humilité, avec un rien de clairvoyance, qui m'a fait accepter d'emblée la vérité sur les ovnis. L'existence des extraterrestres m'a toujours paru évidente et je n'ai aucun mérite. Aucun mérite ? Comment expliquer alors que plus de la moitié des gens refusent de croire aux témoignages et que les neuf dixièmes des autres vivent comme si de rien n'était ? On peut dire que les ufologistes possèdent le véritable esprit scientifique, en face de la mauvaise foi, voire de la bêtise pure et simple qui caractérise les savants officiels. Mais pourquoi ai-je été choisi parmi tous les ufologistes ?

Un malaise me vint. Il n'avait rien de physique. Je me rendis compte que c'était une pensée qui me troublait. Après un instant de réflexion, je réussis à l'identifier. Accepter la vérité…

Je me disais : Regarder la vérité en face, voilà l'essentiel. Et cette idée était chargée d'une angoisse insupportable. Comment peut-on refuser de voir les choses telles qu'elles sont ?

Je luttai un certain temps contre le désespoir qui m'envahissait. Je résistai à l'impulsion folle d'accélérer un bon coup et de jeter ma voiture contre un arbre ou un mur. Pour en finir ! Tu dois accepter la vérité, me disais-je, être sincère avec toi-même. Tu ne crois pas du tout à la version Adam et Ève. Tu sais bien que Marie-Hélène est morte et que tu es seul !

Mais alors, pourquoi ?

Pourquoi les Ummons avaient-ils gardé un survivant de ce fantastique holocauste ? Je ne voyais qu'une explication, et elle me terrifiait.

Je roulais.

Je longeais des prairies vides, désertées par les vaches, les moutons, les chevaux, les chèvres, les volailles… Des millions de tonnes de protéines parties en fumée sur cette Terre où on en avait tant manqué ! Je vis pourtant un coq perché sur un arbre. Un coq de basse-cour très ordinaire… La solitude lui avait-elle troublé l'esprit au point qu'il se prenait pour un oiseau ? Deux canards qui nageaient dans une mare au bord de la route s'enfuir en poussant des cris aigres, bizarres. Quelques petits animaux avaient donc survécu, mais le rayon violet semblait avoir changé leur comportement. Ainsi, les poulets se cachaient dans les branchages, et les canards lançaient des cris de mouettes… Un lapin s'engagea sur la route, puis s'arrêta pour jouer : il ne se dérangea même pas lorsque j'arrivai sur lui. Je ralentis et penchai la tête hors de la voiture pour essayer de voir s'il avait la myxomatose ; mais il semblait normal. Il s'écarta, en deux ou trois bonds placides, au dernier moment.

Je traversai une petite ville où je dus éviter quelques véhicules accidentés. Je me rangeai devant la pharmacie. Là, je restai deux ou trois minutes assis sur mon siège, les poignes accrochées au volant, la tête levée et le regard perdu.

Quelque chose n'allait pas. Mais quoi ? Je me répétais : Tu dois regarder la vérité en face… Et la vérité, c'était que j'étais seul, et sans doute pour toujours.

Je me sentais prêt à supporter la solitude. Mais une autre crainte m'habitait. Si les extraterrestres avaient décidé de faire de moi le dernier survivant d'une Humanité coupable, c'était sûrement pour me juger. Cela me semblait la seule explication possible. Une explication terrifiante. J'allais comparaître un jour ou l'autre devant un tribunal ummon, ou peut-être un tribunal galactique où siégeraient les représentants de nombreuses races hautement civilisées…

Pourquoi ce procès ? Et pourquoi devais-je, moi, simple ufologiste, porter le poids des fautes humaines ? Je n'avais pourtant aucune responsabilité dans les crimes des dirigeants de la planète et des savants officiels… Certes, mais les responsables étaient morts. Je ne parlerais pas en leur nom. Je… Eh bien, je ne savais pas vraiment ce que je ferais.

Je levai les yeux vers le ciel très bleu. Je n'avais plus qu'à attendre. Qu'ils viennent donc me chercher, me juger, qu'on en finisse ! J'espérais et je redoutais à la fois leur venue.

Je renonçai finalement à entrer dans la pharmacie. Les Ummons veillaient sur moi d'une façon ou d'une autre ; ils s'arrangeraient bien pour que je comparaisse en bonne santé devant mes juges. Par exemple, ils ne me laisseraient pas me suicider… Je réfléchis à la possibilité d'un accident, une maladie, un empoisonnement ou n'importe quoi de ce genre, pour les obliger à intervenir. Mais rien ne pressait. Je repris la route.

Plusieurs fois, je crus apercevoir des cadavres en putréfaction dans les rues d'un village, dans une voiture accidentée, un camion aux portières ouvertes, au milieu de petits pois en fleurs, dans un coquet jardin potager au bord de la route, sur le perron d'une villa cossue… Je m'arrêtai plusieurs fois, le cœur battant, et je bondis sans même couper le moteur de ma 4L pour m'assurer que je n'avais pas rêvé. Naturellement, j'avais rêvé… Un cauchemar qui me poursuivait tout éveillé.

Ces hallucinations signifiait-elle que j'étais en train de craquer ? Il faudrait que je me décide à prendre des médicaments. Il y avait sans doute une pharmacie pas très loin de chez Marie-Hélène et Francis. Des tranquillisants me feraient sans doute du bien.

Pendant une dizaine de kilomètres, je ne vis plus de cadavres. Soudain, un chien traversa la route. Un chien vivant, quoique très mal en point : le poil roussi, le dos couvert de plaies… Il se traînait plus qu'il ne marchait. Mais existait-il ailleurs que dans ma tête ? Il disparut derrière une haie. Je n'eus pas le courage de vérifier s'il était réel, ce qui ne me semblait pas tout à fait impossible.

Plus loin, ce fut une odeur pestilentielle qui m'assaillit brusquement. J'avais ouvert la glace de ma voiture. Je dus la refermer presque aussitôt. L'odeur persista cependant. C'était donc aussi un fantasme. J'accélérai à fond, ce qui m'obligea à fixer mon attention sur la conduite. J'obtins assez vite le résultat voulu : je cessai de penser à l'odeur et, du même coup, je ne la sentis plus.

Un peu plus tard, je traversai un bourg en ruine. Des pans de murs noircis se dressaient de chaque côté de la chaussée encombrée de gravats, de véhicules calcinés et de débris divers…

Je savais que c'était une hallucination. Une de plus… Mais je ne pus m'empêcher de ralentir. Je roulai au pas, en zigzaguant au milieu de la rue principale pour éviter des obstacles imaginaires.

À la sortie de la ville, je m'arrêtai près d'un pont et je descendis sur la berge pour boire un peu d'eau sale. J'en profitai pour avaler deux comprimés de tranquillisant.

J'arrivai en fin d'après-midi. J'avais mis presque une demi-journée pour faire soixante-dix kilomètres ! Pourtant, j'avais roulé très vite pendant au moins vingt minutes, en me moquant de la limitation de vitesse, en riant même à la pensée qu'il n'y aurait plus jamais de limitations de vitesse sur cette planète. J'avais pu m'arrêter en tout une demi-heure — en comptant large. J'avais peut-être perdu une demi-heure en détours divers — mettons une heure. Le trajet n'aurait pas dû me prendre plus de trois heures au maximum, et même pas plus de deux heures et demie.

Il semblait donc que je sois resté inconscient pendant environ un temps d'une durée au moins égale. Je me réfugiais dans l'amnésie, dans la folie, parce que je ne supportais pas l'idée d'être jugé par les extraterrestres au nom de l'Humanité ! Mon esprit se défendait en transformant la réalité et en créant des hallucinations. C'était clair et les tranquillisants que je possédais ne constituaient sûrement pas un remède suffisant… Étais-je capable de m'en sortir par ma seule volonté ? J'aurais voulu le croire… Dans quel état les extraterrestres me trouveraient-ils si le procès tardait quelques semaines ou quelques mois ? Mes tout-puissants protecteurs veilleraient-ils aussi, de près ou de loin, sur ma santé mentale ? Je réfléchis à un moyen de leur faire savoir qu'il était temps pour eux d'intervenir. D'un autre côté, j'aurais aimé me débrouiller par moi-même pour faire bonne figure au procès de la Terre…

Le soir tombait et je tournai autour d'un pâté de maisons que je croyais pourtant bien connaître. J'avais oublié de prendre une lampe électrique : si la nuit venait avant que j'aie pu retrouver la maison de Marie-Hélène et Francis, je serais sans doute obligé de dormir dans ma voiture… Bien sûr il y avait une quantité, des dizaines, des centaines de maisons ouvertes et vides ; mais je ne me sentais pas le courage de m'introduire dans une habitation inconnue. Pas maintenant… Plus tard, je finirais bien par m'habituer à cette idée.

Je ne reconnaissais plus le paysage envahi par la brume et le crépuscule. Pour moi, toutes les rues se ressemblent, et dans la banlieue d'une petite ville encore plus qu'ailleurs. Une sorte de vertige me gagnait. Je sentais que j'allais tourner, et tourner tant qu'il y aurait une goutte d'essence dans mon réservoir. Les hallucinations me reprenaient. Au lieu de la ville morte mais intacte, déserte mais aseptisée, dans laquelle j'errais silencieusement, je voyais de nouveau des ruines ravagées par le feu, des voitures brûlées, des arbres abattus, des rues défoncées, des façades déchiquetées, des vitres éclatées… Fantasme de la nuit. J'inventais cela pour échapper au jugement des extraterrestres. Curieuse aussi, cette impression de silence. Je n'entendais plus le moteur de la 4L. Je poussai le klaxon avec ma paume. Cela fit un bruit mièvre, ténu, qui me serra le cœur. Est-ce que j'étais en train de devenir sourd ? Je portai ma montre à l'oreille et perçus tout à fait normalement son tic-tac régulier. Alors pourquoi ne pouvais-je plus entendre le bruit du moteur ni celui du klaxon ?

Et, soudain, la ville s'illumina. Ce fut un éblouissement : tous les lampadaires et toutes les fenêtres des maisons s'allumant à la fois. Un feu tricolore se planta même dans le décor à deux ou trois cents mètres devant moi… Je poussai un énorme soupir de soulagement, freinai un grand coup et m'effondrai sur le volant. J’étais sauvé ! Les extraterrestres avaient ressuscité l'Humanité et fait revivre la Terre ! Ou plutôt, leur attaque n'avait été qu'un simulacre, un avertissement… Tout allait recommencer. Mais la science officielle serait bien obligée de s'incliner !

… Je m'étais laissé prendre à ce mirage et quand les lumières s'éteignirent, toutes ensemble, comme elle s'étaient allumées, les larmes me montèrent aux yeux. Puis je me mis à sangloter.

J'étais bien en train de devenir fou. Quel homme ordinaire aurait pu, à ma place, supporter la perspective d'être jugé bientôt pour les crimes des généraux et des faux savants ? Je n'en pouvais plus.

La nuit était complètement tombée. De plus, le brouillard se levait, un peu trop épais pour la saison. On n'y voyait pas à vingt mètres. Je n'avais aucune chance de trouver maintenant la maison de Marie-Hélène. Que faire ? Une chose commençait à m'étonner : j'aurais dû avoir très faim car je n'avais rien mangé depuis le matin. Non… J'avais totalement perdu l'appétit. Était-ce un effet secondaire du rayon violet ? Les extraterrestres avaient-ils trouvé le moyen de me libérer des contingences matérielles pour mieux me préparer au jugement ?

Eh bien, qu'ils viennent ! Qu'est-ce qu'ils attendaient ? Je me mis à hurler, à les appeler. Puis je tombai sur mon siège et m'allongeai, grelottant de fièvre.

J'avais mal à la tête et au ventre. La diarrhée me força à me lever et à sortir de la voiture.

Puis les extraterrestres se manifestèrent d'une façon inattendue. Sans transition, je me trouvai dans la maison de Marie-Hélène et Francis, que je visitai avec une lampe torche. Elle était vide, naturellement. Intacte et vide comme toutes les autres… Je parcourus les pièces dont deux au moins m'étaient familières. Je reconnus des objets d'art africain, la bibliothèque avec de nombreux ouvrages sur les ovnis et les civilisations disparues, les meubles du salon, le papier peint de la chambre que j'avais occupée deux nuits de suite. Je n'allai pas plus loin que cette pièce. J'étais trop fatigué. Je m'étendis sur le lit, m'enveloppai d'une couverture et dormis jusqu'au matin.

Ce fut de nouveau le jour. Le beau temps avait pris fin. La pluie menaçait sous un ciel gris et maussade. Il faisait froid. Je n'avais toujours pas faim. J'explorai plus longuement la maison. J'acquis vite la certitude que ses occupants n'avaient pas survécu à l'attaque du 23 mai. J'avais maintenant une idée plus précise du rôle que la jeune femme jouait dans le plan des extraterrestres.

Marie-Hélène avait été enlevée avec d'autres terriennes pour servir à une expérience de reproduction entre les Humains et les Ummons. L'humanoïde qui l'avait violée et fécondée avait ensuite, très probablement, prélevé des ovules qui seraient développés in vitro dans quelque laboratoire spatial. Ainsi naîtraient les hybrides, qui étaient appelés à succéder aux Hommes de la Terre. Et le procès dont j'allais faire les frais était destiné à l'édification de ces êtres ! Quant à Marie-Hélène, les extraterrestres n'avaient plus besoin d'elle, pas plus qu'ils n'avaient besoin des autres filles qui avaient servi de réceptacle à leur semence. Ils n'avaient donc aucune raison de se préoccuper de son sort et de la protéger contre les effets du rayon violet…

Voilà. Tout s'enchaînait avec une logique implacable. L'hypothèse du jugement sortait de mes réflexions muée en certitude. Je n'avais plus qu'à me préparer. J'étais prêt. Ou plutôt, je… Je ne savais plus si j'acceptais mon destin.

Pouvais-je refuser d'être jugé pour un crime — ou cent ou mille crimes — que je n'avais pas commis ? Comment me révolter ? Comment échapper aux extraterrestres ? Il n'y avait qu'une solution : le suicide. Mais j'étais à peu près sûr qu'ils ne me laisseraient pas m'échapper dans la mort. Ils interviendraient au dernier moment pour me sauver.

Peut-être même n'auraient-ils pas besoin d'intervenir ? Peut-être m'avaient-ils rendu immortel ?

Je n'avais toujours pas faim. Je quittai la maison, suivis un chemin au bout de la rue. J'étouffais. Je pensais que le grand air me ferait du bien. La fatigue m'obligea à m'arrêter. Je m'assis sur l'accotement. J'avais mal à l'estomac et au ventre. La diarrhée se remettait à me tourmenter. J'avais les poumons brûlants et les yeux pleins de larmes.

Mais rien de tout cela n'avait d'importance car je savais que j'étais immortel.

Je glissai dans un fossé boueux et respirai une affreuse odeur de pourriture. Je tremblai de froid. Je voulus appeler de nouveau les extraterrestres, mais mes dents claquaient si fort que je n'arrivais pas à crier.

Il me vint un doute. Et si… Et si la Terre avait été ravagée par une guerre atomique ? Et si les extraterrestres n'existaient que dans mon esprit ? Et si j'avais inventé ce contact avec les humanoïdes de Wolf 424 parce que je refusais inconsciemment une réalité trop atroce ?

Un instant, l'affreux soupçon me déchira : il n'y a pas d'extraterrestres ! Mais je ne pouvais pas mourir puisque j'étais immortel…

Longtemps après l'holocauste, une soucoupe volante se posa dans un pré où fleurissaient les premières jonquilles. Deux humanoïdes vêtus de combinaisons bleues en sortirent et, rassurés par les mesures de radiations qu'ils venaient de faire, ils marchèrent tranquillement autour de leur appareil.

À un moment, les deux êtres s'arrêtèrent pour contempler les collines vertes de la Terre qui moutonnaient devant eux, sous un soleil vif.

Le premier tendit la main vers l'horizon clair. Le second prononça dans sa langue un mot qui signifiait à peu près : « Les imbéciles ! ».

Première publication

"la Soucoupe du jugement"
››› début des années 80
››› inédit sur papier mis en ligne par Quarante-Deux en mai 2009