KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Brian Stableford : Dimension Brian Stableford

nouvelles de Science-Fiction et de Fantasy réunies par Jean-Marc Lofficier, 2010

chronique par Pascal J. Thomas, 2012

par ailleurs :

Il est rare que la série Dimension en "Rivière blanche" chez Black Coat Press recueille des nouvelles d'un seul auteur (le volume consacré à Philip K. Dick était une collection d'hommages). Sans doute peut-on justifier cette notion d'anthologie à un auteur par le nombre et la variété des nouvelles de Stableford, qui ne cesse de m'étonner.

La préface du livre renvoie à Wikipedia (en anglais) pour une bonne présentation de l'auteur, et sans plus de préliminaires, je passerai aux textes. Ils ont pour la plupart déjà été traduits en français, ce qui nous vaut des traductions de style et de niveau variable.

On trouve en fin de volume "le Sauvetage du Titan", un récit relevant de ce qu'on a un moment appelé le steampunk : accumuler un maximum de personnages célèbres de la littérature populaire naissante dans une intrigue située au tournant des xixe et xxe siècles. Les amateurs goûteront les références, et l'humour toujours acéré de Stableford.

Mais c'est un des textes les plus faibles du livre, qui compte une poignée d'excellentes nouvelles de SF. "L'Exposition secrète", un duel de peintres situé dans le cadre d'un Empire romain uchronique, brille par ses digressions sur le statut de l'artiste, tout en restant moins convaincant dans sa construction dramatique. Par contre, "l'Homme qui inventa le Bon Goût", présenté sous forme d'interview rétrospective, se mesure aux meilleures réalisations de Pohl et Kornbluth : la lutte entre le génie scientifique et le (mauvais) génie du marketing au sein d'une entreprise sans scrupule, voilà qui est hélas toujours d'actualité.

Trois textes de SF du livre tournent autour du thème de l'immortalité (Stableford y revient dans un texte de Fantasy, nous aurons l'occasion d'en reparler). Si "la Grande chaîne de la vie" vaut par la situation présentée et se développe sans surprise, "les Immortels de l'Atlantide" allie suspense, surprise et cruauté. Lecture très agréable, mais qui pâlit devant la charge d'émotion implicite dans "les Flûtes de Pan". Pan, c'est plus ici Peter que le dieu de la Grèce antique : dans un futur non spécifié, tout le monde est immortel, et on ne peut avoir d'enfants qu'à condition qu'ils ne grandissent pas. Nous nous retrouvons dans la peau d'une de ces pré-adolescentes qui se rend compte que, contrairement à toutes les prévisions, elle change… et doit faire face au désespoir de ses parents.

Les autres pépites du livre sont, à mon goût, deux contes merveilleux et moraux — et d'un pessimisme effrayant sur l'âme et la folie humaines. "Le Mal que font les Hommes" est une fable finalement prévisible sur le danger qu'il y a à vouloir à tout prix faire le bien, mais admirablement mise en scène dans des décors chatoyants. "L'Elixir de Jouvence" nous renvoie à l'immortalité, découverte par hasard chez des vignerons périgourdins avec, au terme d'une mécanique inexorable, une fin effroyable. Mais qui prend des airs de punition du péché initial. On reste bouche bée devant la maestria de l'horloger.

Pascal J. Thomas → Keep Watching the Skies!, nº 70, février 2012

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