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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 47 le Joyau des sept étoiles

Keep Watching the Skies! nº 47, août 2003

Bram Stoker : le Joyau des sept étoiles

(the Jewel of seven stars)

roman fantastique ~ chroniqué par Philippe Paygnard

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Si le nom de Bram Stoker est définitivement associé à un roman, Dracula, force est de constater que le romancier a écrit bien d'autres récits. Sa plume lui a permis de visiter bien d'autres lieux que les angoissants manoirs de Transylvanie. Ainsi, son Irlande natale a-t-elle servi plus d'une fois de décor à ses contes ou à ses nouvelles, alors que ses voyages ont inspiré quelques aventures. Pourtant, ce Joyau des sept étoiles n'a pour origine aucune légende celtique, ni aucun souvenir. Il s'intéresse à un mythe bien plus ancien et bien plus exotique, celui de la momie.

Même s'il joue totalement la carte du dépaysement orientaliste, le roman de Bram Stoker est avant tout un huis clos qui piège ses protagonistes dans la propriété de l'archéologue Abel Trelawny. Le narrateur de cette histoire s'appelle Malcolm Ross, un jeune avocat, et c'est son amour pour la charmante Margaret Trelawny, fille d'Abel, qui l'entraîne dans cette bien étrange aventure. Un mal mystérieux frappe Abel Trelawny et d'incompréhensibles agressions nocturnes se produisent dans son entourage. Inquiète, Margaret demande de l'aide à Malcolm Ross, en qui elle a toute confiance, car la police semble dépassée par les évènements. Assisté par le docteur Winchester et par Eugene Corbeck, deux proches de la famille Trelawny, Malcolm finit par découvrir que la source du mal dont souffre Abel Trelawny se trouve dans la superbe collection d'antiquités de ce dernier. Il s'agit plus précisément de la momie de la Reine Tera qu'il a ramenée d'Égypte avec l'aide de Corbeck. Étonnamment conservé, ce corps a d'étranges particularités et pourrait receler le secret de l'immortalité qu'Abel Trelawny rêve de percer. Ce faisant, il a d'ores et déjà manipulé des forces que ni lui, ni ses compagnons ne comprennent et qu'ils n'ont aucun moyen de contrôler.

Il serait fort tentant de comparer ce Joyau des sept étoiles à l'œuvre majeure de Stoker, Dracula. On y retrouve, en effet, une des thématiques récurrentes de Bram Stoker, sa fascination pour la mort. Elle est ici personnifiée par la momie, incarnation tout à la fois de la mort éternelle et de l'immortalité. À ce titre, la momie est une figure aussi terrifiante que le vampire. Tout comme dans Dracula, on croise aussi, dans le Joyau des sept étoiles, un narrateur-acteur : Malcolm Ross d'un côté, Jonathan Harker de l'autre. Et, si l'on poursuit ce jeu des ressemblances, on peut constater que, loin d'être des héros solitaires, Ross et Harker sont aidés dans leur quête par des personnages secondaires d'importance. Dans le Joyau des sept étoiles comme dans Dracula, ils apportent une aide bienvenue au personnage central à travers leurs connaissances et leurs aptitudes personnelles qu'ils soient médecins comme Winchester et Seward, adeptes de sciences plus ou moins occultes à l'instar des professeurs Trelawny et Van Helsing ou de professions plus aventurières tels qu'Eugene Corbeck et Quincy Morris. On pourrait également, avec un minimum d'imagination, y retrouver une demoiselle en péril : Margaret victime de la momie et Mina proie du vampire. Mais ce serait aller un peu vite, car Bram Stoker déploie des techniques narratives bien différentes pour conter ces deux histoires dont l'une a une conclusion plutôt optimiste puisque le Mal absolu, Dracula, est vaincu, alors que l'autre se termine de manière beaucoup plus sombre.

Cette nouvelle édition française de l'œuvre de Bram Stoker proposée par Terre de Brume est incontestablement supérieure aux éditions précédentes. En effet, jusqu'à présent, seule une version tronquée du Joyau des sept étoiles avait été publiée en France. Terre de Brume propose enfin la traduction intégrale du roman de Bram Stoker [1]. Revue et augmentée par rapport à la version classique proposée successivement par les éditions Marabout (1976), par les Nouvelles éditions Oswald (1982) et par le Fleuve noir (1994 & 1998), cette édition française a également l'intérêt de proposer une fin alternative plus optimiste.

Cette nouvelle version française du Joyau des sept étoiles est définitivement une acquisition indispensable pour tout amateur de l'œuvre de Bram Stoker. C'est également une lecture si ce n'est obligée du moins conseillée pour tous ceux qui veulent découvrir ou redécouvrir l'univers d'un auteur qu'on ne saurait limiter à un seul livre, même s'il s'agit d'un incontestable chef-d'œuvre de la littérature fantastique tel que Dracula.

Notes

[1] Traduction de Jacques Parsons révisée et complétée par Richard D. Nolane ; préface de David Glover.