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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 44 Téranésie

Keep Watching the Skies! nº 44, août 2002

Greg Egan : Téranésie

(Teranesia)

roman de Science-Fiction ~ chroniqué par Philippe Heurtel

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À neuf ans, Prabir ne mène pas une existence ordinaire : ses parents, des chercheurs en génétique, vivent sur l'île déserte de Teranésie, dans le Pacifique. Ils y étudient une race inconnue de papillons qui défie les lois de l'évolution. Mais un jour, la guerre éclate dans la région. À la mort de ses parents, Prabir quitte l'île avec sa petite sœur. Ils sont recueillis au Canada par des parents et entament là-bas une nouvelle existence.

Vingt ans plus tard, la région fait à nouveau parler d'elle : cette fois, ce sont des dizaines d'espèces animales inédites (insectes, poissons, oiseaux, mammifères) qui se mettent à proliférer ; des espèces qui semblent développer des caractéristiques disparues depuis des millions d'années, comme si des gènes demeurés inactifs tout ce temps étaient à nouveau exprimés.

Pour qui a lu les précédents romans de Greg Egan, Téranésie surprend par la faible place qu'y occupe la science. Il faut en effet attendre près de la moitié du livre pour que des idées scientifiques et science-fictives vertigineuses commencent — et encore, timidement — à pointer leur nez. Pourtant le roman tient la route tout ce temps grâce à ses personnages. Il s'agit là encore d'une surprise car, malgré toute l'admiration que l'on peut avoir pour les romans Isolation, la Cité des permutants et l'Énigme de l'univers, il faut bien reconnaître que les personnages de Greg Egan avaient jusqu'à présent autant de charisme que des chamallows tièdes. Mais là, on s'attache au personnage de Prabir et à son destin, oubliant presque qu'on lit un roman de Science-Fiction.

Bien sûr, Egan continue de construire des univers de futur proche, par les petites touches qu'on lui connaît : technologiques (gadgets électroniques et modifications du corps humain) et sociales (Egan aime fabriquer des “tribus” et leur attribuer des discours parfois extravagants). Et bien sûr, la hard science est au rendez-vous : l'auteur d'Isolation parvient tout de même à introduire la physique quantique dans la génétique !

Pourtant, et c'est là que le bât blesse, les idées hallucinantes qui faisaient l'intérêt des romans précédents sont bien moins nombreuses, et aussi moins approfondies : la notion de dérapage de l'évolution mérite plus que ce qu'Egan en a fait. On aurait voulu les voir développées un peu plus, et pour cela, l'auteur aurait dû commencer plus tôt, ou bien allonger son roman. La fin, en particulier, est trop rapide, très abrupte, et donne le sentiment d'un roman achevé dans la précipitation.

Le résultat n'est pas mauvais, non : on ne saurait que trop conseiller la lecture de Téranésie, et tout particulièrement aux détracteurs de l'auteur australien. Mais force est de reconnaître qu'il ne s'agit pas là du meilleur Egan. Puissent les romans suivants croiser avec succès les personnages humains de ce dernier avec la verve vertigineuse des précédents. Les manipulations génétiques sur les romans de hard-science, ça doit aussi être possible, non ?

Notes

››› Voir autre chronique du même livre dans KWS 38.