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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 19 l'Épopée de Gilgamesh

Keep Watching the Skies! nº 19, mai 1996

l'Épopée de Gilgamesh

conte mythologique sumérien anonyme ~ chroniqué par Éric Vial

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À force de recopier de confiance Versins et autres annexionnistes érudits, certains finissent par avoir envie de tout vérifier d'eux-mêmes. Même les rapports entre la plus vieille épopée de l'humanité (fin du IIIe millénaire av. J.C.) et les genres littéraires qui intéressent a priori les lecteurs de KWS, même s'il se veut SF intégriste. D'où l'intérêt de parler ici de cette publication établie par Raymond Jacques Tournay et Aaron Shaffer au Cerf. Évidemment, sauf spécialisation particulièrement poussée (les assyriologues présents dans la salle sont priés de lever le doigt), le lecteur science-fictionneur n'aura peut-être pas grand plaisir à consulter les notes de bas de page, du moins celles numérotées, translittération des expressions originelles. Mais il aura sans doute intérêt à éplucher les notes alphabétiques, qui éclairent souvent le texte… texte qui dans ces conditions ne représente généralement pas la majeure partie des pages. On est dans l'érudition, pas dans la collection d'heroic fantasy de J'ai Lu…

C'est là qu'on (le critique filandreux) sent le lecteur de KWS, voire, pire, son rédacteurenchef s'impatienter. Dire qu'ils aimeraient bien qu'on leur parle du texte. De Gilgamesh le géant, d'Enkidu l'homme sauvage, des prostituées qu'ils croisent et font quelque peu plus que croiser, des rêves prophétiques réitérés, des combats singuliers d'où naît une amitié virile (?), de l'expédition contre un méchant, contre le conseil mais avec l'aide au moins morale des “anciens”, des batailles dans une forêt de cèdres, mettant en jeu les forces naturelles, de l'affrontement avec une concupiscente fille du dieu Anu (si) nommée Ishtar, et qui, repoussée, demande le “taureau céleste” pour combattre Gilgamesh, menaçant autrement d'aller en enfer (« quand j'aurai fait monter les morts, ils dévoreront les vivants / plus nombreux que les vivants seront les morts »), de la transformation du susdit taureau en viande de boucherie, de la mort de l'ami, de la rencontre avec des hommes-scorpions, de quelques discussions avec des dieux ou des mortels, du déluge, de l'impossibilité de mettre la main sur la plante de jouvence qui éloigne la mort, de l'échec de la quête de l'immortalité, du voyage au pays des morts, et de quelques épisodes annexes ou connexes. Le tout sur tablettes d'argile, avec lacunes et interpolations…

Les lecteurs, et pire (voir plus haut), ont été vaguement satisfaits. Mais ils savaient déjà, depuis certain habile anglo-saxon [1], qu'il y avait matière à fantaisie héroïque. À broderie, plus haute lice que dentelle d'ailleurs. Mais puisqu'il y a aussi, l'appareil critique le montre, matière à maintes analyses et interprétations, rapprochements et gloses, ces quelques pages renferment moult matière pour les amateurs, les adaptateurs, et les détourneurs. À chacun d'en profiter. Entre Gor et l'hôpital Garichankar, ou aux abords de Fomalhaut quatre-vingt-seize.

Notes

[1] Robert Silverberg, bien sûr ; mais voir aussi l'usage plus récent et original des mythes sumériens par Neal Stephenson dans le Samouraï virtuel — NdlR.