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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 17 le Dernier dimanche de monsieur le chancelier Hitler

Keep Watching the Skies! nº 17, février 1996

Jean-Pierre Andrevon : le Dernier dimanche de monsieur le chancelier Hitler

court roman de Science-Fiction ~ chroniqué par Olivier Bidchiren

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Bien plus qu'un roman noir atypique, le Dernier dimanche de monsieur le chancelier Hitler de Jean-Pierre Andrevon est un polar uchroniste et minimaliste.

Écriture concise, descriptions succinctes et phrases sans ornements ; l'auteur a choisi les mots qui tuent pour tisser une atmosphère glauque, nappée de médiocrité. Cette abstraction joue un rôle capital : elle amplifie l'ambiance noire du récit, à l'image de cet Hitler qui a rêvé de pureté.

Minimaliste par l'étroite relation entre le IIIème Reich et l'Union soviétique stalinienne, tel le carré blanc sur fond blanc de Malévitch, puisque minimaliste dans la structure narrative de l'uchronique vie quotidienne d'un dictateur devenu homme du commun, une curiosité, une marionnette pour les shows télévisés. Ainsi nous est montrée l'histoire d'Adolf Hitler, au travers des deux derniers jours de sa vie.

L'Allemagne nazie a perdu la guerre contre l'URSS ; les États-Unis et le Japon n'ont pas rejoint ce conflit réduit à un continent… Contraint de fuir, Hitler s'est réfugié en Amérique, à New-York, dans un trois-pièces de South Brooklyn en compagnie de son épouse, Eva Braun.

Ce dimanche est celui du 14 avril 1949, premier jour de la Seconde guerre mondiale opposant l'URSS de Staline qui attaque Pearl-Harbor à l'Amérique de Dulles qui lâche la première bombe A sur Moscou. Et Hitler songe à la grandeur qu'il peut retrouver s'il s'allie à Staline mais… le dernier dimanche est celui d'un vieillard de 60 ans atteint des maladies de Parkinson et d'Alzheimer, trompé par sa femme, trahi par son ami Goering devenu un bon Américain affublé d'une putain dénommée Marylin Monroe qui rêve de cinéma, cheveux gris, moustache rasée, prostate cancéreuse, mémoire défaillante, délaissé par ses partisans, ridiculisé en public, surveillé par le FBI, que nul ne regrette, excepté…

Jean-Pierre Andrevon nous dessine une Amérique ridicule, absurde, assoiffée de casser du bolchévique, qui vit dans l'opulence d'un capitalisme outrancier. Ce roman, réécriture d'un moment du XXème siècle, est une uchronie acide, une plaidoirie contre des systèmes politiques forcément dictatoriaux : Hitler tout aussi malade qu'un Staline, qu'un Dulles ou qu'un autre dirigeant. Avec ce roman, nous voyons notre monde corrompu, blasé et persuadé de sa légitimité grâce à son leurre démocratique, incapable d'y discerner son échec et sa folie.

Jean-Pierre Andrevon a souhaité désamorcer les ignorants qui se complaisent dans la satisfaction et le nombrilisme, et rire de la bêtise humaine et de l'absurdité de la guerre ? Espérons que ce soit cela !