KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Olivier Aubry : D.R.E.A.M.S.

roman de Science-Fiction, 1997

chronique par Éric Vial, 1998

par ailleurs :

Il se passe des choses aux frontières de la SF, entre X Files et l'internet. Par exemple ce roman. La couverture rappellera la création d'Adam, vue par Michel-Ange, ou, pour les plus cultivés, l'affiche de E.T., avec cependant une main dont le traitement graphique équivaut à un grand panneau : attention, informatique. D'autant que le fond, lui aussi, rappelle des circuits imprimés.

À l'intérieur, c'est un thriller canonique, produit calibré, avec découpage serré, en cinquante-six chapitres, passage rapide du point de vue d'un personnage à celui d'un autre, mais lisibilité assurée. Avec aussi personnages façon Harlequin. Avec un milieu à la fois exotique et familier, parce qu'à coup de feuilletons on connaît mieux les USA — ou ces USA imaginaires — que Pézenas, et aussi que des personnages sont français, côté expatriés d'ambassade — vous ne vous attendiez pas aux Deschiens… Avec une Française expatriée, un ado, un journaliste — irlandais, lui —, qui font que vous avez le choix pour vous identifier. Et il y a même une histoire.

Des ados qui se suicident à cause d'un jeu informatique. On le devine vite, plus vite que les personnages, ce qui est toujours valorisant. À partir de là, on a vite une piste. La Française, mère de l'ado, a pour amant un patron qui fabrique de nouvelles consoles — et en offre une au gamin. De quoi foncer. Dans le panneau. Ce serait mal pensant. L'industrie est au-dessus de tout soupçon. On se rabattra sur un savant fou, qui est aussi un imprécateur dénonçant les dangers des jeux électroniques. Et paie de sa personne pour en démontrer la nocivité : le bouquin est fait, et pour ceux qui aiment les jeux de rôle et le virtuel, et pour ceux qui en ont peur. Chacun y trouve de quoi se conforter. Calibré, vous disais-je.

Et la SF là-dedans ? Il y en a — au niveau du gadget. Comme chez 007. Et de l'heroic fantasy, avec le monde auquel fait accéder la fameuse console de jeu. On est en pays de connaissance. Mais aux frontières. Dans une sorte de zone grise. Dans une SF light avec de vrais morceaux de poncifs dedans. Reste que, rouerie de l'auteur aidant, ça se laisse lire. Sans déplaisir. Et on se laisse prendre au jeu.

S'il faut être optimiste, il se peut que la SF soit en train de déteindre. Au lavage. C'est habituel chez elle. Mais il y a quelques années, ça se traduisait par une perte de couleurs “littératurante”. Maintenant, elle semble colorer plus ou moins légèrement d'autres genres. On ne s'en plaindra pas, même si la lecture est parfaitement facultative.

Éric Vial → Keep Watching the Skies!, nº 28, mai 1998

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