KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Fabienne Betting : Bons baisers de Mesménie

roman de Science-Fiction, 2016

chronique par Éric Vial, 2016

par ailleurs :

Les pays imaginaires font partie du voisinage immédiat de ce qui nous intéresse ici. Bon prétexte pour fourguer quelques lignes sur cette histoire passablement déjantée, où un narrateur passablement raté a acquis des rudiments de la langue locale (en fait « à peine un dialecte ou un patois parlé par une poignée de paysans dégénérés ») parce que la lectrice, à la Sorbonne, portrait des jupes vraiment très courtes. D'où sa réponse à une annonce demandant un traducteur : début du succès — ne rêvez pas, ça ne marche pas avec les autres langues, du moins pour ce que j'en sais — et des emmerdes, d'autant que la Mesménie est assez fatalement pourvue d'une mafia locale.

Le pays lui-même est une « verrue » d'un peu moins de 1 600 km2 et d'un peu moins de 16 000 habitants, et est « coincé entre la Russie et l'Estonie ». Et la description, à partir de ce qu'en a dit la lectrice sus-évoquée, est assez moyennement enthousiasmante :

« Même son nom est vilain. Je l'aurais inventé, je n'aurais pas fait pire […] Là-bas, on a l'impression que l'Homme et la nature se sont concertés pour effacer toute beauté : une végétation quelconque, d'un vert uniformément chiasseux, pousse sur un terrain quelconque, ni vraiment plat, ni tout à fait vallonné ; en automne, les feuilles pourrissent sur leur branche sans prendre de jolies couleurs comme elles le font partout ailleurs ; en hiver, la neige tombe du ciel déjà grisâtre et recouvre toute chose d'un voile de poussière déprimant. Dans les villes, il n'y a que des rues étroites et rectilignes bordées d'immeubles en béton, gris et carrés, avec des grandes portes noires et des petites fenêtres carrées, comme les yeux du fourbe dans les films d'espionnage des années 1950, ceux en noir et blanc. Les passants ne s'y promènent pas : ils marchent d'un pas pressé en regardant le sol jonché de papiers gras et les eaux d'égout qui s'écoulent le long des trottoirs en répandant leur abominable odeur. »

Le matériel publicitaire accompagnant le livre précise que la monnaie est la graine du chou local, que le plat traditionnel est à base de semoule et de chou local, que le drapeau, de deux verts ternes mais différents de part et d'autre d'une diagonale, porte en son centre un chou vert, que la température hivernale moyenne est de moins cinq degrés, l'estivale de plus cinq. Parmi les cinq mots-clés translittérés du cyrillique figurent "Ouïtch", « Morsure de gros lapin albinos, typique du nord » du pays, "Aïeglagla", « Brouillard givrant », et un terme imprononçable et kilométrique signifiant "touriste" mais dont le sens littéral est « Étranger privé du sens de l'orientation ayant pénétré en Mesménie par erreur ».

On voit que tout ceci est fort enthousiasmant, et rappelle quelque peu certains des Dingodossiers de Goscinny et Gotlib. Cela a-t-il pour autant un rapport la Science-Fiction ? C'est une autre question, et je vous remercie de l'avoir posée…

Éric Vial → Keep Watching the Skies!, nº 78, août 2016

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