KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Robert J. Sawyer : Flashforward

(Flashforward, 1999)

roman de Science-Fiction

chronique par Philippe Paygnard, 2012

par ailleurs :

Alors que se déroule, au CERN de Genève, une importante expérience qui vise à percer certains des nombreux mystères de la physique des particules, le monde tout entier subit une étrange perte de conscience. Durant quelques minutes, l'ensemble de la population humaine a un bref aperçu de ce que sera son futur d'ici une vingtaine d'années.

Il est toujours intéressant de lire ou de relire un roman ou une nouvelle qui sert de base à une adaptation cinématographique ou télévisuelle. C'est bien évidemment le cas avec le roman Flashforward, écrit par Robert J. Sawyer en 1999, qui, le temps d'une brève saison en vingt-deux épisodes, est devenu une série télévisée diffusée, aux États-Unis sur la chaîne ABC en 2009-2010, et en France sur TF1 en 2011. Le jeu consiste alors à rechercher les ressemblances et les différences entre deux versions d'une même œuvre destinées à des médias bien distincts, mais conservant, on peut l'espérer, un thème commun.

Tout commence au niveau de la géographie puisque Robert J. Sawyer situe l'histoire de son roman à la frontière franco-suisse, là où est installé le Grand Collisionneur de Hadrons, tandis que Brannon Braga (Star trek: Enterprise) et David S. Goyer (Blade: the series), les créateurs-producteurs de la série, rapatrient tout naturellement l'action aux États-Unis, à Los Angeles.

Viennent ensuite les personnages. Sawyer choisit de s'intéresser aux scientifiques dont l'expérience semble avoir provoqué le flashforward, et tout particulièrement à trois d'entre eux : le docteur Lloyd Simcoe, chercheur d'origine canadienne, son jeune confrère grec, le docteur Theo Procopides, et l'amie de cœur de Simcoe, le docteur Michiko Komura. De leur côté, les producteurs de la série se rabattent sur un très classique duo d'agents du FBI, Mark Benford et son partenaire Demetri Fordis Noh, complétant leur distribution par Olivia, l'épouse de Mark, une brillante chirurgienne. On peut remarquer que chacun de ces trois personnages reprend, pour l'essentiel, les traits de caractère des héros du livre. Ainsi, dans le roman, Theo Procopides est l'un des rares êtres humains à ne pas avoir eu de flashforward ; il craint que cela signifie qu'il sera mort d'ici la survenance de cette vision du futur. Dans la série, c'est l'agent Noh qui n'a pas eu de flashforward et qui se démène comme un beau diable pour éviter cette mort qui semble lui être réservée. Pour corser un peu leur série, les scénaristes hollywoodiens ajoutent à ce trio un bon nombre de personnages secondaires, dont un qui porte le nom de Lloyd Simcoe…

Parmi les autres différences existant entre les deux versions de Flashforward, il y a la durée de la perte de conscience qui est de moins de deux minutes dans le livre et de très exactement deux minutes et dix-sept secondes dans la série. Il y a aussi le fait que la vision projette les dormeurs vingt ans dans le futur sous la plume de Sawyer, alors que ce n'est que six mois pour Braga et Goyer. Enfin, si le flashforward du roman est le résultat d'un simple concours de circonstances pratiquement impossible à reproduire malgré les efforts des scientifiques, celui de la série semble être le fait de terroristes que traquent les agents du FBI.

Il reste cependant de nombreux points de convergence entre les deux versions de Flashforward puisque la vision du futur imposée à la population du globe oblige à une réflexion sur la prédestination, sur le libre arbitre et, par voie de conséquence, sur la possibilité ou non de modifier un avenir qui semble tout tracé pour l'Humanité tout entière. Ces questions ne sont pas nouvelles et servaient déjà de base à plusieurs mythes et légendes grecs où nombre de héros, malgré leurs efforts, ne pouvaient échapper à une implacable destinée.

Alors que la série télévisée jouait, avant de disparaître, la carte de l'action et du complot, le livre de Robert J. Sawyer donne beaucoup plus à réfléchir sur la prédestination et sur le libre arbitre. Et si la romance entre Lloyd Simcoe et Michiko Komura n'est pas des plus convaincantes, la quête que mène Theo Procopides pour découvrir les moindres détails d'un avenir qu'il n'a pas pu voir et son combat pour modifier une mort annoncée suffisent à rendre cette lecture intéressante.

Philippe Paygnard → Keep Watching the Skies!, nº 70, février 2012

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