KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Robert J. Sawyer : Veille (Singularité – 2)

(WWW – 2: Watch, 2010)

roman de Science-Fiction

chronique par Noé Gaillard, 2010

par ailleurs :

Disons le tout net, cette deuxième livraison de Singularité m'a paru moins dense, moins forte qu'Éveil, sa sœur aînée. D'une part, la découverte de Webmind n'est plus une surprise et j'ai même été étonné de trouver cette entité un peu trop anthropomorphe au début et beaucoup moins à la fin. Tant que Webmind n'a pas vraiment acquis ce que nous sommes, il me semble qu'il peut difficilement nous ressembler, et quand il sait tout ce qu'il est possible de savoir, comment peut-il prendre fait et cause dans un sens plutôt que dans un autre ? La théorie des jeux et l'exemple des sommes non nulles, ou encore cette fine et intelligente allusion à l'Église unitarienne, me paraissent un peu facilement contrebalancer nos instincts de prédateurs. Attention, je ne veux pas dire que ce roman est sans intérêt. Je veux dire que l'aspect “purement” SF de l'émergence d'une I.A. consciente cède le pas à une tentative astucieuse et bien argumentée de justifier cette prise de conscience au fur et à mesure que l'on cherche à la détruire par simple paranoïa.

En résumé, les USA se sont rendu compte de l'existence de Webmind et cherchent à le détruire avant de savoir s'il est bien- ou mal-veillant, ce qui est normal dans la mesure où s'ils interviennent trop tard ils risquent de disparaître. Mais Caitlin, qui découvre l'amour ado de manière singulière, ses parents, le docteur japonais qui lui a rendu la vue et bien sûr Webmind veillent et ripostent. Entre-temps, on aura pu constater la stupidité des services secrets US et canadiens, suivre la vie de Chobo le singe peintre et observer quelques exemples des bienfaits de Webmind qui a dévoilé son existence au monde entier, tout en découvrant un Sawyer très critique à l'égard de l'État du Canada.(1) Du classique auquel s'opposent les discussions entre Caitlin et sa mère, ou avec d'autres. Par ce biais, Sawyer nous propose des moyens d'“absorber” la singularité, de la comprendre, et sur ces points-là le roman est absolument passionnant. C'est un vrai plaisir que de confronter son esprit à ses propres jeux. Et l'on ne s'étonne plus de voir Webmind citer notre bon René Descartes dans sa signature : « Cogito, ergo sum. »…

À lire et à laisser reposer. C'est peut-être à la qualité de ce qu'il en reste quand on a fini de le lire qu'on peut juger d'un bon ou d'un mauvais livre ?

Noé Gaillard → Keep Watching the Skies!, nº 67, décembre 2010

Lire aussi dans KWS la chronique d'Éveil & Merveille par Noé Gaillard


  1. Il se demande, par l'intermédiaire de Caitlin, si ce pays a une politique étrangère ; j'ai découvert cette interrogation au moment où le journal le Monde racontait comment le Canada avait perdu son influence sur le monde en perdant des postes et des pouvoirs au sein de l'ONU.

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