KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

China Miéville : Lombres

(Un Lun Dun, 2007)

roman de Fantasy pour la jeunesse

chronique par Noé Gaillard, 2010

par ailleurs :

J'aime beaucoup les œuvres de China Miéville — excepté le Roi des rats, auquel je suis resté insensible —, et j'ai été fort content de retrouver avec Lombres un univers très proche de celui de Perdido Street Station. Un de ces univers de SF ou de Fantastique en perpétuelle évolution, relativement imprévisible, et qui donnent l'impression que l'auteur se les glisse en chausse-trapes sous les pieds comme des gageures (genre : « Voyons voir comment on va se tirer de ce piège des maisons “Mool” »). De quoi s'agit-il ? D'abord d'une grande ville, Lombres, qui serait l'envers de Londres, sur laquelle la nuit brille la nule, où les bus volent, où règnent les Prophéçogurs (personnellement, j'aurais préféré les “Prophéçaugures”), où l'on construit des maisons dans des piles de vieux trente centimètres. Un univers fou ou farfelu selon les goûts, qui voit l'abbaye de Westminster devenir celle de Webmaster et abriter des Mygalucarnes et l'Antiflingue (qui permettra de vaincre le Smog). Zanna et Deeba, deux ados, après une première incursion dans cet univers dont elles reviennent effrayées, se trouvent changées. Zanna, qui à Lombres était la Shwazzy (la Choisie), a oublié sa mission. Deeba s'inquiète sérieusement du sort des amis qu'elle a laissés là-bas et qui sont en butte au Smog qui envahit tout. Elle découvre que celui qui devait lutter contre la fumée noire est un traître et retourne à Lombres pour tenter de convaincre ses amis. Mais nul ne la croit, sauf un demi-fantôme, et elle doit se débrouiller seule — ou presque — pour vaincre. Rassurez-vous, l'univers fou où le chapelier fou est remplacé par un receveur de bus ne disparaîtra pas — on peut même croire et/ou penser qu'il réapparaîtra si ce roman a l'heur de plaire. Deeba ira même jusqu'à agresser une ministre dans Londres avant de retrouver sereinement son petit monde familial.

Le lecteur ado auquel s'adresse ce Miéville sera certainement convaincu de la nécessité du combat écologique présenté ici (lutte contre le Smog et les usines) ou de celle du combat pour la défense des livres contre les images. Il sera peut-être aussi sensible à la façon dont sont décrits les adultes (hésitants, courageux, faibles, sordides). Il n'attachera peut-être pas beaucoup d'importance à la liste des personnes remerciées qui figure en page 339, mais l'adulte curieux y vérifiera qu'il a bien repéré les références, et remarquera comme moi que Miéville oublie de remercier René Magritte, que l'amateur du peintre retrouvera page 376.

La lecture de ce roman m'a permis de mieux comprendre pourquoi j'aime bien son auteur. Tout le passage avec le personnage appelé Parroll (et ses Progénitermes) et les jongleries avec les mots font mesurer l'inventivité de Miéville… Et c'est cette même inventivité qui illumine les Scarifiés et ses autres romans. Une inventivité qui je l'espère vous séduira…

Noé Gaillard → Keep Watching the Skies!, nº 65-66, juillet 2010

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