Andrew Weiner : Boulevard des disparus

Paru en même temps que Hollywood blues de Kim Newman, ce roman aussi mêle une apparemment traditionnelle histoire de détective privé et la S.-F. Le flou dans les identités, dans le décor, dans le contexte avec une guerre imprécise qui s'éternise, met assez vite la puce à l'oreille. Avec la ville anonyme dans laquelle se déroule l'enquête, et à laquelle semble se réduire l'univers, on est dans un monde à la fois trop proche et trop différent de notre réalité. Et quand une seconde histoire se superpose à la première, dans le monde de l'informatique, dans un univers aux réalités moins incertaines, mais avec des personnages communs, on voit assez vite de quoi il peut s'agir. D'autant que la quatrième de couverture avait déjà annoncé cette duplication, et mis la puce à l'oreille en évoquant le cyberpunk. Restent tout de même pas mal de surprises. Et un final qui fait bien davantage que flirter avec le dit cyberpunk. D'où un ensemble pour le moins agréable pour l'amateur de S.-F. point trop allergique au roman policier.

Reste à savoir si l'inverse est vrai. Si le roman peut accrocher l'amateur de roman policier. Si celui-ci, qui se trouvera bien en pays de connaissance, ne s'y trouvera pas trop, et ne se lassera pas vite de ce qui pourrait lui apparaître comme des stéréotypes rabâchés. Bref, s'il aura la patience d'attendre que les choses dérapent — de son point de vue. Si c'est le cas, d'ailleurs, on peut parier que ce qu'il découvrira ne le choquera guère : les réalités virtuelles semblent assez largement présentes dans la réalité pour ne pas poser trop de problèmes. Reste qu'il faudrait, justement, l'avis d'un amateur de polars, pour savoir si l'hybridation est effectivement réussie…