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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 45 la Reine des damnés

Keep Watching the Skies! nº 45, octobre 2002

Anne Rice : la Reine des damnés

(Queen of the damned)

roman fantastique ~ chroniqué par Philippe Paygnard

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Ce nouveau tirage de la Reine des damnés paraît fort à propos pour accompagner la sortie en salles du film homonyme de Michael Rymer. Il faut cependant remarquer que Pocket, en dehors de la coïncidence des dates et d'un simple bandeau rouge [1] , n'a guère cherché à capitaliser sur cette adaptation cinématographique passée quasiment inaperçue au box-office américain. Ainsi, la couverture de cette version poche est une fort classique illustration et non une photo tirée du long-métrage produit par Warner Bros. Il faut d'ailleurs constater que ce film, même s'il s'inspire du roman d'Anne Rice, prend de grandes libertés vis-à-vis de l'intrigue, de la narration et des personnages de la Reine des damnés. D'ailleurs, la romancière, déçue par l'adaptation d'Entretien avec un vampire, n'a pas souhaité participer de près ou de loin à cette nouvelle aventure hollywoodienne. Elle préfère se consacrer aux millions de lecteurs à travers le monde qui s'intéressent à Lestat, Louis, Armand, Marius, Pandora et tous les autres enfants nés de son imagination. Il n'est d'ailleurs peut-être pas utile de trop s'appesantir sur cette adaptation cinématographique qui ne peut en aucune façon restituer toute la richesse du roman d'Anne Rice. Après Entretien avec un vampire et Lestat le vampire, La Reine des damnés constitue le troisième volet des Chroniques des vampires d'Anne Rice. Alors que les précédents ouvrages s'intéressaient principalement aux origines de Lestat et de sa famille vampirique, La Reine des damnés entraîne le lecteur aux sources même de l'Histoire pour y découvrir les origines de la race des vampires.

Figure centrale des Chroniques des vampires d'Anne Rice, Lestat de Lioncourt, transformé en star du rock'n roll, se fait littéralement voler la vedette de ce nouveau chapitre par trois femmes : Jesse, Maharet et Akasha. Cette dernière, troublante reine des vampires, a été tirée d'un sommeil millénaire par la musique de Lestat. La quête des origines permet à la romancière d'empiéter sans vergogne sur les terres de Christian Jacq, nous faisant visiter une Égypte de fantaisie où la magie et les esprits coexistent avec une Humanité naissante qu'Anne Rice nous décrit avec des mots toujours excellemment choisis.

À ce propos, force est de constater que le style d'Anne Rice se caractérise par une profondeur et une richesse peu courantes dans la littérature vampirique moderne. La romancière n'est pas dupe de la réputation de préciosité qui entoure son écriture et elle n'hésite pas à se moquer d'elle-même à travers quelques clins d'œil bienvenus. Ainsi, dans l'un des tout premiers chapitres de La Reine des damnés, Bébé Jenks raconte combien de fois elle avait essayé de lire le livre de Lestat, « mais il y avait trop de mots compliqués et boum, chaque fois, elle piquait du nez ». Véritable constante de l'œuvre d'Anne Rice, la richesse de son vocabulaire transparaît sans peine dans l'excellente traduction d'Anne Vogüé et Evelyne Briffault. Cette évidente recherche participe totalement à la narration. Les mots sont tous choisis dans un but précis, ils rendent compte de la violence, mais aussi du romantisme de ces créatures de la nuit.

La Reine des damnés apporte une superbe conclusion à la quête des origines vampiriques initiée par Entretien avec un vampire. Fort heureusement pour ses millions de lecteurs, Anne Rice n'a pas mis un terme à ses Chroniques des vampires avec ce livre. Depuis 1988, date de parution de la Reine des damnés, Lestat et ses compagnons de la nuit ont refait parler d'eux dans de superbes romans finement ciselés tels que le Voleur de corps, Memnoch le démon ou Pandora. Ils viennent même de croiser les sorcières de la dynastie Mayfair, autre saga d'Anne Rice, dans Merrick, son dernier roman.

Notes

[1]  Portant la mention « La suite d'Entretien avec un vampire enfin portée à l'écran ».