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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 23 the Unnatural

Keep Watching the Skies! nº 23, avril 1997

David Prill : the Unnatural

roman de Science-Fiction inédit en français ~ chroniqué par Pascal J. Thomas

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Fantastique ? À vrai dire, ce roman est inclassable : il parle surtout de la mort, il n'invente pas de technologie, voilà qui le rattache au fantastique ; il se situe dans un univers parallèle, voilà qui le rattache à la S.-F. Ou peut-être faudra-t-il le flanquer dans un panier “humour”, voire dans la littérature générale… non, ils n'en voudraient sûrement pas là-bas.

Andy Archway est un jeune homme passionné. Il a un rêve : émuler le héros de sa jeunesse, Mordecai, un embaumeur qui détient le record mondial du nombre de cadavres préparés. Dans son antre, il garde ses précieuses collections de pulps, Undisturbed ou Respectful casket tales (les contes du cercueil respectueux !). Un jour, passe un recruteur pour une grande chaîne de maisons funéraires, qui va pousser ce jeune talent à poursuivre des études supérieures de toilette funéraire…

Dans l'Amérique parallèle esquissée en fond par Prill, l'embaumage tient une place qui rappelle celle du baseball : c'est un sport, ça passionne les gens et en particulier la jeunesse, et c'est le lieu des records les plus révérés. Mais c'est aussi un commerce, et Andy va se retrouver pris dans une lutte féroce entre deux compagnies rivales, qui l'une comme l'autre ne reculent devant rien pour torpiller la concurrence. Et sa tentative de dépasser le record de Mordecai va lui faire toucher du doigt l'inhumanité de sa conduite…

Une fois passée la surprise des premiers chapitres, le fou rire que peuvent déclencher certaines scènes (comme le cours consacré aux ruses commerciales que doit connaître tout bon entrepreneur de pompes funèbres), le livre devient plus grave dans sa dénonciation d'un capitalisme moderne, sans âme. Et peut-être moins intéressant, moins excentrique en tout cas : oui, Andy va mûrir et retrouver le chemin des vraies valeurs et de la qualité dans l'embaumage personnalisé et artistique. Qui en aurait douté ? Mais le choc de départ est dissipé, l'emploi systématique des termes techniques de la profession mortuaire a cessé d'amuser ou de dégoûter, et ce qui aurait été un sujet en or pour une nouvelle s'essouffle un peu sur un roman. Mais ce n'est que le premier de Prill (qui a derrière lui une carrière dans le journalisme) ; s'il continue à élaborer des situations aussi loufoques, tous les espoirs sont permis quant à ses livres suivants.