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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 13-14 Hou des machines

Keep Watching the Skies! nº 13-14, juillet-août 1995

Alain le Bussy : Hou des machines

roman de Science-Fiction ~ chroniqué par Jean-Louis Trudel

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Ce roman souffre d'un cas aigu de trouble de l'identité. Fait-il partie d'une série ou tente-t-il de s'ériger en histoire complète ? S'il a été écrit pour s'intégrer à la série qui a débuté avec Yorg de l'île et Rork des plaines, il faudrait alors le stigmatiser pour l'inclusion de toutes ces scènes et ces redites qui alourdissent inutilement la trame narrative si on a lu les volumes précédents. S'il a été écrit pour constituer un volume indépendant, il faudrait alors critiquer l'état très fragmentaire de la plupart des histoires qui restent inachevées à la fin du livre. Il faudra au moins un autre livre pour mener à terme le "Cycle de Yorg".

En effet, plusieurs pages résument de façon plutôt plate et ennuyeuse les événements du premier tome. C'est d'autant plus inutile que ces révélations ne servent pas à grand-chose ; le roman est ainsi écrit que la plupart des épisodes sont autonomes, réduits à des oppositions binaires fort simples à comprendre : poursuivis et poursuivants, attaqués et attaquants, etc. Les allusions directes aux événements des premiers volumes sont rares, car les motivations de la plupart des personnages sont tout aussi immédiates : ramener du butin, exterminer des ennemis, revenir chez soi, fuir un adversaire trop puissant, etc.

Yorg de l'île débutait lors d'une guerre totale dont les séquelles bactériologiques empêchent le retour à la surface des survivants d'un abri souterrain privé. Des siècles ont passé et il y a maintenant trois groupes dans les cavernes de l'Abri : un groupe dirigé par Paul, le fondateur de l'Abri, qui cherche toujours une méthode afin de combattre le virus fatal qui a décimé les populations à la surface ; le gros des survivants qui ont formé une société vouée à la survie dans les profondeurs, et les éboueurs, des mutants qui creusent leurs propres galeries. A la surface, deux tribus ont fait alliance : les Yagrr (peut-être de l'allemand Jagr, ou chasseur) et les Hommes-du-Vent. Le jeune Yorg représente les premiers et le chef Rork les seconds. Yorg et Rork s'unissent pour une expédition vers l'est, afin de contacter le peuple des Machines dont l'empire s'étend inexorablement vers l'ouest. La traversée de l'Europe par Yorg et Rork a été décrite dans Rork des plaines, où on les voit échapper aux Niepps, maîtres d'un empire fluvial.

Dans ce livre, Yorg et Rork entrent en contact avec le peuple des Machines et s'enfuient avec un certain nombre de sujets opprimés de cet empire, tandis que les Niepps lancent une expédition dans la direction de l'Abri mais se heurtent aux clans des Malahims.

Comme dans le premier livre, on doit se poser des questions sur la curieuse coïncidence qui fait d'un peuple noir de cruels cannibales qui se gouvernent par la terreur et d'un peuple asiatique à la peau jeune de cruels oppresseurs qui agrandissent leur empire par des méthodes impitoyables, tandis que les représentants de la liberté et de l'espoir technologique sont en général blancs de peau.

Néanmoins, comme d'habitude, la narration d'Alain le Bussy est alerte et tient le lecteur en haleine. Les personnages sont bien typés, ou même schématiques, et les péripéties se succèdent. Peu de rebondissements, peu de surprises, mais pas non plus de bévues : quand le Bussy se confine à une technologie qu'il maîtrise, il reste plausible.

Bref, ce roman se lit sans ennui, exception faite des redites signalées plus haut, mais il doit impérativement être lu dans le cadre du cycle de "Yorg", sinon il restera incompréhensible et frustrant pour le lecteur non-averti.