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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 8 les Deux orphelines vampires

Keep Watching the Skies! nº 8, juillet 1994

Jean Rollin : les Deux orphelines vampires

roman fantastique ~ chroniqué par Micky Papoz

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La collection "Angoisses", dirigée par Juliette Raabe semble prendre jusqu'à ces derniers jours un bon tournant. La directrice s'est adjointe au fil des mois les meilleurs auteurs de Fantastique, mais d'après les dernières informations, il serait question que cette collection devienne celle des psycho-killers, ce qui est dommage puisqu'avec les Deux orphelines vampires s'amorçait une croisière vers ce que fut le regretté théâtre du Grand-Guignol où furent jouées de nombreuses pièces de Jean de Lorde. Jean Rollin est devenu un spécialiste de cet auteur et lui rend un vibrant hommage à travers les pages de ce roman. Il nous en avait donné un avant goût plus séraphique dans les Demoiselles de l'étrange paru en 1990 aux éditions Filipacchi. Deux orphelines, Louise et Henriette, sont aveugles. La cécité des deux jeunes adolescentes est incompréhensible, car, enfants, elles voyaient… uniquement en noir et blanc. Les deux jouvencelles sont adoptées par le bon docteur Dennery. Émotion. Émoi vite réprimé quand on comprend que Louise et Henriette retrouvent la vue dès la nuit tombée. Facétieuses, elles profitent de l'obscurité pour s'échapper et se raconter au cours de leurs promenades de délicieuses horreurs. Les mots : serpents, chauve-souris, divinités sanglantes et sacrifices humains font briller leurs yeux et leur arrachent des rires. Farceuses, mais affamées aussi, puisque les deux orphelines ont besoin de se nourrir de sang. Leurs victimes sont égorgées par leurs quenottes aiguisées. Le titre du roman annonce la couleur incandescente avec laquelle les deux orphelines vont se jouer de leur protecteur et de ceux et celles qu'elles vont rencontrer au cours de leurs escapades nocturnes. Plaisir équivoque de leurs relations presque incestueuses. Tac tac tac font les deux cannes blanches. Croc croc croc font les petites dents. Les deux fillettes en robe blanche et chaussettes montantes vont hanter les cimetières parisiens et se repaître des gorges offertes par les visiteurs attardés dans les allées. Voilà un bon roman qui se laisse dévorer, le mot n'est pas trop fort, sans aucun déplaisir. On attend une suite.

Autres romans remarquables et à ne surtout pas rater dans cette collection : le Baigneur de Jean Mazarin, qui, à coup de retours dans le passé de l'occupation, nous fait revivre de noirs épisodes particulièrement émouvants. À signaler aussi le grinçant et excellent Cauchemars d'acier de Jean Pierre Andrevon, Dîner de têtes de Kââ, ainsi que Souterrains de Sylvie Picard. Une collection à surveiller si elle n'abandonne pas le fantasmagorique, mais, si c'est le cas — n'omettons pas la probabilité de délicieuses surprises —, les passionnés d'étrange se rabattront sur la collection Frayeur, dirigée par Jean Rollin qui devrait combler leurs désirs. Deux affaires à suivre de très près. Les collections éditant des auteurs français ne sont déjà pas si nombreuses. À nous de les encourager.