Chroniques de Philippe Curval

Georges Panchard : Forteresse

roman de Science-Fiction, 2005

chronique par Philippe Curval, 2005

par ailleurs :
Thrillers futuristes

S'il est une qualité que l'on peut reconnaître au roman de Georges Panchard, Forteresse, c'est de ne pas être politiquement correct. L'invasion de l'Europe par l'Islam n'y est pas interprétée comme un fait de société, mais comme une menace directe pour la démocratie. Démocratie qui se révèle dangereuse par son excès de tolérance et son absence d'idéologie. Sans compter la guerre des sectes entre les juifs, des gangs entre les multinationales.

Pour le reste, il s'agit d'un thriller futuriste sans profonde originalité, relevé d'une touche de maniérisme. En 2030, sur notre continent, la Correction a renvoyé les immigrés dans leurs foyers. Les obèses fans de Dieu dirigent les États-Unis. Clayborne, responsable de la sécurité d'une entreprise géante, tente de protéger son patron qu'il sait menacé par une arme technologique d'intrusion mystérieuse, Ghost. Taillé au cordeau et mené avec maestria, il manque à Forteresse l'essence même de l'esprit spéculatif. Car on ne distingue que l'image superficielle de cette société future.

Une dizaine d'écrivains francophones de grande qualité sont apparus depuis vingt ans. La collection "Ailleurs et demain" n'en a publié aucun. On attendait donc une révélation. Ce n'est pas le cas.

Philippe Curval → le Magazine littéraire, nº 441, avril 2005

Lire aussi la chronique de la suite, Heptagone

Michel de Pracontal : la Femme sans nombril

roman de Science-Fiction, 2005

chronique par Philippe Curval, 2005

par ailleurs :

Journaliste scientifique, Michel de Pracontal, après quelques nouvelles de SF, relève le défi avec la Femme sans nombril. Ce « roman d'aventures avec des personnages humains et non humains » (sic), commence comme Micromégas. Un équipage d'extraterrestres débarque à Roswell afin d'observer l'Humanité. Pour eux, art, technique, science et métaphysique ne constituent pas des catégories séparées, mais différents angles de perspective possibles afin d'envisager le même objet. Bien vite, ces observateurs caustiques, au regard souvent égrillard, s'investissent dans l'action. Car ce qu'ils découvrent les sidère : dans les centres commerciaux déserts défilent des slogans publicitaires sans consommateurs pour les absorber. Pourquoi les Terriens ont-ils disparu alors qu'ils ne constatent aucune trace d'arme de destruction totale ? À travers une enquête riche en imprévus, les quatre Zébriens vont remonter à la source du mystère et de ses responsables, Gorge profonde, Edgar J. Hoover, Richard Tell-Mann, physicien prodige.

Certes, Michel de Pracontal se soucie peu de littérature, privilégie l'effet au style, la satire à l'analyse. Mais son roman, bourré de références, de clins d'œil et de connaissances, séduit par son ton jubilatoire.

Philippe Curval → le Magazine littéraire, nº 441, avril 2005